Des mannequins blancs désarticulés portés par trois comédiens en noir, une dentiste/dentellière qui brûle les empreintes digitales des migrants, une femme folle qui lave en se tortillant du derrière des préservatifs dans une baignoire vide, une palissade de bois, un réverbère qui tient plus d'un mirador que d'un éclairage urbain.

Le décor est planté. Humour et violence. No man's land où toute barbarie est possible. On croit être dans un camp de réfugiés, et petit à petit on n'en est plus très sûr. Où est-on ? Dans le monde d'aujourd'hui ? Dans un pays lointain ou au pas de notre porte ?

Éclairages soignés, musique subtile interprétée par trois musiciens qui sont présents tout le long du spectacle : ils bruitent, accompagnent les chants et sont aussi les migrants épargnés car la dentellière et le patron, un fossoyeur, aiment la musique. Il leur reste un peu d'humanité, pour la petite Baby-Yar qui grandit dans ces immondices, pour le jeune neveu arrivé de nulle part. On passe du rire aux larmes, de la comédie avec Tangi Daniel, aux multiples rôles et qui n'en finit pas d'étonner le spectateur, à la tragédie d'un saint Frusk qui a les mains en sang et qui meurt dans les bras de la dentellière devenue subitement amoureuse. Les cinq comédiens assurent des tonalités différentes sur cette palette : acteurs, chanteurs, marionnettistes.

Pièce étrange, étonnante. Création des frères Kloareg (Erwan a écrit la pièce, Thomas l'a mise en scène), on a ici un beau travail d'équipe et une recherche artistique de niveau régional. Le surtitrage est une bonne idée, et permet à tous de comprendre une histoire qui mériterait d'être écrite et publiée, avec sa mythologie étrange, ses histoires à tiroir, ses drôles d'humains traversant la vie avec leurs traumatismes, leurs cauchemars, leur cruauté ...

Pour en savoir plus sur le Théâtre Piba : (voir le site)