Ce jeudi 9 août, Pascal Jaouen revenait sur son fantastique parcours. Véritable acteur du renouveau de la broderie bretonne, il a dédié sa conférence, organisée dans le cadre du Festival Interceltique de Lorient, à Yann Fañch Kemener, disparu le 16 mars 2019.
Originaire de Bannalec, il est né le 19 mai 1962, le jour de la Saint Yves. Grandir parmi les fleurs et la végétation dans la maison familiale l’orientera vers son premier métier : celui de jardinier paysagiste. Mais l’irrésistible attirance pour la broderie nait déjà : sa première émotion artistique, c’est quand il achète une carte postale de Maryvonne Come, élue reine de Cornouaille en 1971. La fascination, il l’a ressent en croisant ces dames de Bannalec qui arborent dans la rue leurs somptueux costumes traditionnels.
« Quelle beauté quand on voyait ces femmes se parer et se préparer à chanter, à danser ! », s’esclame celui à qui il arrive déjà enfant, de temps à autre, de revêtir le costume traditionnel pour le festival des genêts d’or de Bannalec.
En 1982, il rejoint le cercle celtique d’Elliant. Dans cette zone d’enclave, personne ne peut lui prêter le costume du pays, très particulier. Il décide alors de le confectionner lui-même. Et quelle histoire ! il lui faut à la fois comprendre la technique, trouver les matières et les porteurs de ce savoir-faire faire. Malheureusement, il n’existait déjà plus de tailleur, et il était très difficile de trouver les bonnes matières... Comme le fil de soie notamment. Il y prendre goût, au point de mener ensuite de nombreuses recherches pour comprendre l’évolution des costumes et leurs spécificités.
Il se rapproche pour ses travaux de collecte de Jean Michel Perodec et de Viviane Elias, qui sera sa première professeure de broderie. Elle, qui avait très vite pris conscience de ce patrimoine qui partait en lambeaux, forme avec joie ce jeune élève.
Alors après 10 ans à alterner entre son métier de jardinier-paysagiste à la ville de Kemperle (Quimperlé), la danse et l’apprentissage de la broderie, il finit par sauter le pas.
Il ouvre sa première école de broderie d’art à Locmaria. Ce lieu, chargé d’histoire, lui permet de développer notamment la technique de broderie glazig. Il veut créer un lieu d’apprentissage pour tous. Véritable bazhvalan (entremetteur), la broderie est pour lui un art populaire. Il appartient à tout le monde de l’apprendre. D’ailleurs, ses écoles (40 actuellement ouvertes), accueillent parmi leurs 2 500 élèves à partir de 8 ans… Jusqu’à 95 ans ! Qu’il s’agisse d’un loisir ou d’une reconversion professionnelle, chacun est bienvenu.
Une exposition en cours jusqu’au 21 septembre à Quimper, qui se terminera par 4 défilés entre les 21 et 22 septembre, 4 écoles à ouvrir à la rentrée et 2 de plus en 2019… Et un stage de 6 mois de breton à partir de janvier prochain, via Mervent, pour se réapproprier sa langue ! Un programme bien chargé pour Pascal Jaouen, qui nous témoigne avec passion son attachement à la Bretagne. Lui qui se sent amputé de sa langue va donc bientôt la parler couramment et même proposer des cours de broderie en breton : « N’ayons pas honte de le dire : nous sommes plusieurs à être amputé de notre langue. Alors j’invite tous les bretons à en faire autant, et à réintroduire cette langue dans le quotidien ».