LA BRETAGNE N'A PAS DIT SON DERNIER MOT;
Le livre est constitué d’un ensemble d’articles parus au long d’une période d’une trentaine d’années. On y trouvera des différences de ton, mais l’unité d’inspiration apparaît très vite, c’est la volonté de défendre une valeur pour moi essentielle : mon identité, autrement dit l’identité bretonne. C’est aussi la volonté de beaucoup de Bretons et elle le serait de bien davantage encore si tous nos compatriotes avaient vraiment conscience des menaces qui pèsent sur elle. Or,
« Quand notre identité est menacée », écrivait à la fin des années soixante un sociologue canadien, « nous avons l’intime certitude que notre devoir est de nous battre.» (1)
Les textes qui suivent sont donc des textes de combat, que le ton en soit humoristique, ironique, serein ou véhément. Ils forment un tout que j’espère cohérent, bien qu’ils puissent être lus dans un ordre aléatoire, chaque article formant aussi, de son côté, un tout. D’une façon générale cependant, les textes qui viennent à la fin du livre représentent un aboutissement, un approfondissement, ou si l’on préfère, un mûrissement d’idées présentes de façon plus ou moins implicite dès le début. L’ensemble peut être considéré comme un puzzle dont chaque article constitue une pièce. Lorsque la dernière pièce trouve sa place, l’image enfin complète apparaît avec netteté.
J’ai changé le moins de choses possibles dans ces textes qui apparaissent ainsi tels qu’ils ont été publiés la première fois. Il est certain que, surtout pour les plus anciens, je ne les écrirais plus de la même façon parce que l’homme que je suis maintenant n’est plus tout à fait le même que celui que j’étais il y a trente ans. Mes idées se sont précisées, ont acquis, du moins je l’espère, des contours mieux définis. En revenant sur ces idées, en m’efforçant de les affiner, je n’ai peut-être pas toujours réussi à éviter les redites. Qu’on ne m’en veuille pas trop. Il m’a semblé, en contrepartie, qu’en laissant au maximum leur forme originelle à ces textes, mon cheminement apparaîtrait plus clairement.
J’ai cherché tout au long de leur écriture, consciemment ou inconsciemment, à renouer avec les grandes époques de l’histoire de la Bretagne, avec le temps où elle n’était pas enfermée dans un hexagone étriqué, mais où, pays libre et fier, elle affrontait hardiment les vents du grand large et respirait sans entraves. Il en résulte que les influences que j’ai subies et recherchées, les idées dont j’ai fait mon miel viennent souvent d’horizons inhabituels, de Scandinavie en particulier, mais pas seulement. En conséquence, le lecteur rencontrera des citations d’auteurs qui lui sont peu familiers, mais – c’est bien le cas de le dire ! – qui gagnent à être connus. Nous avons, en Bretagne, un immense besoin d’air frais.
Espérons qu’en ouvrant le maximum de fenêtres, ce livre contribuera à chasser beaucoup de miasmes, qu’avec d’autres il contribuera à redonner à une Bretagne solidement ancrée dans son identité une santé, une vigueur et une confiance en soi qu’il est bien difficile d’avoir quand on vit dans une atmosphère « hexagonale » confinée. N’en doutons pas : la Bretagne aura bien le dernier mot !
Marcel Texier
Philippe Argouarch