Paris, 5 mars 2025 – Une cinquantaine de députés, dont une bonne partie d’élus bretons, viennent de déposer une proposition de loi transpartisane visant à autoriser l’usage des signes diacritiques des langues régionales dans les prénoms et noms de famille inscrits à l’état civil.
Le débat sur l’usage du tilde (~) dans les prénoms bretons a ressurgi ces dernières années avec plusieurs affaires emblématiques, notamment celles des petits Fañch, dont les parents ont dû mener un combat judiciaire pour obtenir gain de cause face aux refus des services de l’état civil. La semaine passée encore, deux décisions favorables ont été rendues à Lorient et Angers, confirmant que l’interdiction de ces signes n’a aucun fondement légal clair en l’absence de loi spécifique.
L’origine de cette interdiction remonte à une circulaire du 23 juillet 2014, qui dresse une liste des signes autorisés dans les actes d’état civil sans inclure le tilde. Cette lacune a été exploitée par certains procureurs de la République pour rejeter des prénoms contenant des caractères propres aux langues régionales.
Ce n’est pas la première fois que cette question arrive sur la table législative. En 2021, un article de la loi Molac, qui visait à protéger et promouvoir les langues régionales, prévoyait déjà l’autorisation des signes diacritiques spécifiques. Mais cet article a été censuré par le Conseil constitutionnel au nom de l’article 2 de la Constitution, selon lequel « la langue de la République est le français » .
Cette fois, les députés porteurs de la proposition de loi ont modifié leur approche. « Nous avons restreint la portée du texte uniquement aux prénoms et noms, sans toucher aux autres actes d’état civil » , explique Annaïg Le Meur, députée du Finistère, dans le journal Le Télégramme.
L’objectif est d’éviter une nouvelle censure constitutionnelle en présentant une version plus ciblée et juridiquement acceptable.
Parmi les députés bretons impliqués dans cette initiative, on retrouve :
Le chemin sera encore long avant que cette proposition ne devienne une loi applicable. « Elle ne sera pas au programme de la niche parlementaire du 31 mars, mais nous réessayerons la prochaine fois » , précise Annaïg Le Meur dans le journal Le Télégramme.
D’ici là, les députés bretons comptent bien convaincre d’autres élus de soutenir la mesure et porter le débat au plus haut niveau. Selon la députée finistérienne, il est même envisagé de remettre un dossier sur la question au Premier ministre, François Bayrou, lui-même favorable à la reconnaissance des identités régionales.
« Tout le monde ne se sent pas concerné par cette question, mais c’est pourtant un sujet qui dépasse la simple question régionale. Il s’agit avant tout du respect de la diversité des langues et des territoires » , conclut-elle.
Le combat pour le tilde et les autres signes régionaux est donc loin d’être terminé. La mobilisation des élus bretons et de la société civile sera déterminante pour faire évoluer cette législation et mettre fin à une discrimination linguistique encore bien ancrée dans l’administration française.