Les dommages provoqués tant sur le plan archéologique que sur le plan de l'intégrité patrimoniale du site du square dit “du Dolmen” ( voir notre article ) et ( voir notre article ) ont été évoqués le 14 décembre au Conseil municipal de la quatrième ville de Bretagne.
Rappelons que le quartier du Dolmen a été profondément bouleversé ces dernières années par un important programme immobilier qui n'a pas suivi – dans son aspect architectural comme dans son aspect urbanistique et paysager – les recommandations de l'architecte des Bâtiments de France. Si les immeubles de l'époque de la Reconstruction dans les années 1950 respectent les lieux, avec en particulier l'utilisation de parements de schiste, on ne peut pas en dire de même de ces nouveaux immeubles sans âme dont la construction semble guidée avant tout par le rendement financier maximum.
Ce programme immobilier a de plus enclavé le square du dolmen dont la vue est bouchée en direction de l'artère principale – rue Henri Gautier – quand on arrive de Nantes à Saint-Nazaire. Les riverains très attachés à leur dolmen avaient pourtant demandé dès 2007 à la municipalité de tenir compte de l'importance de ce site mégalithique dans leur plan en orientant différemment le bloc d'immeubles pour éviter un enclavement total du dolmen.
Lors d'une séance quelque peu agitée (une habitude pour les Nazairiens) le maire Joël Batteux, dont la gestion municipale est jugée autocratique par nombre de ses administrés, n'a pas caché son étonnement devant la levée de boucliers d'élus d'opposition de droite comme de gauche. Il n'a pas fait dans la dentelle pour répondre aux élus et associations nazairiennes : " C'est la première fois qu'on me parle avec autant d'enthousiasme du Dolmen. J'apprends que peut-être il y aurait des trésors cachés dans le sous-sol. Pourquoi ne pas nous avoir alertés de longue date ? Jamais nous ne les aurions empêchés d'aller fouiller. Il est encore temps, tout n'a pas été creusé ".
Comme si le ton quelque peu provocateur de son intervention n'était pas encore assez fort, le premier magistrat devait ajouter en direction de l'élu de l'UMP Jean-Louis Garnier qui l'avait interpellé sur le sujet : " Je vous donne l'autorisation si vous voulez aller faire quelques trous au pied du dolmen. Je peux même vous donner une petite cuillère pour aller creuser ". Une réplique qui n'a pas manqué de faire réagir Zack Moullec, élu de gauche écologiste et fondateur de Natur Action (1) :" Vous avez vraiment une manière méprisante d'en parler ".
L'élu écologiste interrogé par l'ABP confirme les propos du maire et ajoute " Là j'ai réagi en lui disant qu'il répondait avec mépris et arrogance. Qu'il ne s'agissait pas de cailloux mais d'histoire. Hors conseil, il m'a répété son histoire de petite cuillère. Je lui ai répondu que je ne l'avais pas attendu, que des trous au pied du dolmen, j'en avais probablement fait il y a 30 ans lorsque j'étais gamin puisque j'habitais juste à côté et que j'allais y jouer aux billes ! ".
Face aux affirmations de la mairie concernant une autorisation de la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles) pour des travaux sur le site du dolmen, l'historien G. de Saint-Loup réplique en précisant que " La DRAC soutient le contraire, elle n'a aucune trace d'autorisation de ces travaux, l'autorisation, si elle a existé, aurait plus de deux ans, donc elle ne serait plus valable, et surtout jamais la DRAC n'aurait autorisé ce qui s'est passé, alors que l'architecte en charge du dossier avait bien écrit dans sa lettre du 7 décembre 2007 qu'il ne fallait pas toucher au square. Quant à la DRAC, elle n'est pas un organisme qu'on invite à l'occasion, en se disant “tiens au fait si t'as envie de creuser”… ".
Ce grand amoureux de Saint-Nazaire ne tient pas à en rester là et indique à l'ABP " Par ailleurs, j'ai écrit une lettre résumant les faits, et mentionnant la tirade de monsieur Batteux au dernier conseil, à destination du ministre de la Culture, madame Aurélie Filippetti, à monsieur Vincent Berjot, directeur général des patrimoines, et à monsieur Bertrand-Pierre Galey, adjoint au directeur général des patrimoines, chargé de l'architecture, envoyée au Cabinet du directeur général des Patrimoines, 182 rue Saint-Honoré, 75033, Paris Cedex 01. D'autres Nazairiens vont aussi écrire au ministère dans la semaine, pour signifier leur indignation devant le peu de cas dont fait monsieur Batteux des lois de la République ".
Par la plume de Damien Perrotin qui " regrette la légèreté avec laquelle ont été menés les travaux de la place du dolmen. S'agissant d'un site néolithique classé, des fouilles préventives s'imposaient. Quant à l'affirmation selon laquelle le dolmen est une pièce rapportée, elle est grotesque. Les gravures anciennes le représentent toutes à sa place et dans son état actuel, au cœur de l'ancien enclos du prieuré de Penhoët. Cette inconséquence est représentative d'une politique qui méprise et ignore le patrimoine de notre ville au profit d'une vision banlieusarde sans âme ni avenir ".
Affaire à suivre...
(1) Natur Action http://www.natur-action.org/ . Ne pas confondre avec EE LV (Europe Écologie-Les Verts), parti qui soutient la politique du maire.