Nous venons d'assister cette semaine à un véritable recul pour la cause des langues régionales, pour la cause des langues de France.
Depuis de nombreuses années, chaque alternance politique à la tête de notre pays avait été l'occasion de progrès pour la cause des langues régionales.
Ainsi, en 2008, avec d'autres parlementaires, j'avais porté l'inscription des langues régionales dans la Constitution. Ce combat de longue haleine avait commencé dès 2002 et il avait fallu 6 ans d'action et de persévérance pour aboutir à la présence de nos langues de France dans le texte constitutionnel.
En moins d'une semaine, on a assisté à un véritable recul.
- Par un courrier au Président de la Commission des lois de l'Assemblée nationale, le Président de laRépublique exprime sa volonté de ne pas inscrire la possibilité de ratifier la Charte européenne des langues régionales à l'occasion de la réforme constitutionnelle. Comble des choses, le Président de la Commission des lois n'est autre que le Finistérien Jean-Jacques URVOAS.
- La majorité présidentielle rejette, jeudi 14 mars, toutes les propositions visant à faire progresser la cause des langues régionales à l'école. Le Projet de Loi sur la « Refondation de l'Ecole » était probablement la seule occasion du mandat de faire évoluer concrètement l'enseignement des langues régionales à l'Ecole.
- Enfin, la majorité, retrouvant ses racines génétiquement jacobines, adopte l'amendement suivant : "Après accord des représentants légaux des élèves ou des élèves eux-mêmes s'ils sont majeurs, les professeurs peuvent recourir aux langues régionales chaque fois qu'ils peuvent en tirer profit pour leur enseignement de la langue française." Vous l'avez bien lu, pour une simple sensibilisation aux langues régionales, il faudra une autorisation des parents. Cette dernière évolution législative, ne permet l'évocation des langues de France que si elle valorise la langue française. Les langues régionales ne sont donc que des supplétives du Français, pouvant éventuellement en expliquer les racines, mais n'ayant pas leur vie propre et un avenir possible.
Pour la cause des langues régionales, reniement et recul auront marqué cette semaine. Mais si nous avions eu un débat de fond et une opposition franche sur des arguments riches de conviction nous aurions pu saluer la franchise de nos adversaires. Au contraire, cette semaine a été marquée par de petites et lâches résignations. Un jour, c'est le Conseil d'Etat qui émet des réserves, en oubliant que le Conseil d'Etat émet de multiples réserves sur de multiples textes et que le Gouvernement peut parfaitement passer outre. Le lendemain, c'est le Conseil constitutionnel dont on nous dit qu'il pourrait être opposé, sans d'ailleurs qu'on l'ai consulté. Tout cela justifie les petites habiletés, les petites reculades, les petites combines ; tout cela au mépris des promesses de campagne et notamment de l'engagement 56 du programme du candidat Hollande. Chez les défenseurs des langues régionales, habileté, reniement et recul provoquent d'abord un sentiment de colère. Puis la colère se transforme en une motivation et en des convictions, renouvelées, renforcées et encore plus déterminés. Nous savons désormais sur qui nous pouvons compter et que désormais, les bonnes paroles et belles promesses ne suffiront plus.
Jusqu'à présent, chaque Gouvernement faisait progresser, parfois de façon limitée, la question des langues régionales. Pour la première fois, il s'agit aujourd'hui d'un recul.