Des responsables indépendantistes catalans ont été condamnés lundi à Madrid à des peines dignes du grand banditisme. Leur crime ? Avoir milité pour la tenue d’un référendum sur l’autodétermination de la Catalogne. Avoir milité pour que puisse s’exprimer le peuple catalan.
De souvenir de démocrate, personne n’a été emprisonné en Europe « de l’ouest » aussi lourdement et aussi injustement depuis la fin de la deuxième guerre mondiale pour des actions politiques non violentes. Ce type de peine est aujourd’hui réservé aux opposants chinois ou nord coréens, ou encore caractéristique des dictatures du tiers-monde. Pourtant, en France, après la déclaration de 52 députés qui soutenaient les catalans avant leur procès, aujourd’hui, à part le député breton Molac et les députés corses et l’eurodéputé Alfonsi, personne ne bronche. Les media hexagonaux, pourtant si prompts à vanter le titre honorifique de patrie des droits de l’homme pour leur pays, restent muets sur la question, ou ont d’autres priorités.
Il semblerait qu’ici aussi, la peur de la "sédition", du "séparatisme", paralyse et empêche toute réflexion en profondeur sur le droit à l’autodétermination, pourtant inscrit dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme de 1948. Et toute prospective sur le droit à s’exprimer librement, comme le montre, d’une manière beaucoup moins tragique mais tout de même symptomatique, le refus du référendum sur la réunification en 44.
Devant un tel aveuglement, seule l’Europe devrait pouvoir faire entendre sa voix. Une Europe fédérale, qui saurait convaincre les États Nations que leur temps est compté et que le moment est venu d’écouter tous les peuples qui la constituent, car la démocratie est l’affaire de tous et aucune raison d’État, aussi brutale soit-elle, ne devrait pouvoir s’y opposer. Une Europe qui, enfin, pourrait parler d’une voix forte, jusqu’en Syrie, et ne pas se contenter de larmes de crocodiles face au drame kurde.
Mais cette Europe n’existera pas, tant que les égoïsmes espagnols, français ou anglais prendront le pas sur l’intérêt général de notre continent. Ainsi, si l’empire ottoman était déjà l’homme malade de l’Europe au 19ème siècle, l’Europe, si elle ne se ressaisit pas, pourrait bien devenir l’homme malade du monde.
Vincent Fraval, secrétaire général de Breizh Europa