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- Communiqué de presse -
Instrumentalisation de la vie associative : Démocratie en danger !
Depuis plusieurs années, dans le secteur culturel, mais cela s'est également développé dans le secteur social, la vie associative, porteuse de démocratie, est la cible d'attaques qui sont de nature
Par Gérard Gautier pour Blanc c exprimé le 31/08/11 14:42

Depuis plusieurs années, dans le secteur culturel – mais cela s'est également développé dans le secteur social – la vie associative, porteuse de démocratie, est la cible d'attaques qui sont de nature à la mettre en péril.

En préambule, il est bon de dire que le monde associatif a sa grand part de responsabilité dans cette dérive. Le rapport à l'argent et le regard suspicieux porté aux sources de financement émanant du monde des entreprises a amené à privilégier l'accès facile aux seules subventions des institutions plutôt que de rechercher avec lui des partenariats contractualisés. A été ainsi oublié qu'il y a une relation très étroite entre Culture et Économie.

Pour s'en persuader il suffit de prendre connaissance des chiffres suivants concernant le pourcentage des ressources publiques dans le secteur associatif :

- France 93 %

- Italie 40 %

- Royaume-Uni 35 %

- Japon 35 %

- États-Unis 30 %

- Suède 30 %..

(Source enquête Archambault 1998. Dossiers « IFRAP » février 2001)

Les subventions étant accordées le plus souvent sans qu'il soit fait référence à des grilles de répartition mais souvent en fonction d'affinités.

Or, au même moment où se précisent les conséquences de la réforme territoriale et où l'argent se fait rare, de nombreuses collectivités territoriales, de toutes tendances, mettent de plus en plus en place – en s'appuyant parfois sur des carences de fonctionnement – « l' instrumentalisation » de la vie associative en se substituant souvent à elle, en étant les financeurs, les réalisateurs et les bénéficiaires en termes de valorisation d'image, de communication interne et politique.

Une manière de consolider son pouvoir et parfois, sa mainmise sur des bénévoles ayant perdu de facto leur « esprit critique,» leur liberté.

Certains édiles, responsables, ont pleinement conscience des risques que cela peut faire courir à la vie associative et par là-même, à la démocratie. Il est difficile d'être en même temps « juge et partie. »

Ainsi, en 2008 lors de la campagne pour les municipales, l'actuel maire de Metz, en présentant son projet, avait organisé une soirée-débat sur ce thème et annoncé clairement : « Ce renouveau passe, en premier lieu, par le développement d'une démocratie locale libérée de ses carcans. Je souhaite notamment mettre fin à l'instrumentalisation de la vie associative et de la vie culturelle ».

On ne peut être plus clair.

L'autre élément qui éclaire ce qui précède est le problème des “intermittents”

Il semble évident que certains métiers : techniciens, monteurs, éclairagistes, sont indispensables à l'existence et au développement des activités de la vie culturelle et connaissent pour la plupart d'entre eux du fait de leur spécificité, une précarité certaine. Ceux-là justifient pleinement le bénéfice du statut d'intermittent.

Il est tout aussi évident que nombreux sont les chanteurs, musiciens, acteurs qui font choix de vivre leur passion et… de leur passion. Ceci pourrait d'ailleurs être élargi, si l'on suit le raisonnement, aux artistes peintres et autres plasticiens, voire auteurs et autres écrivains.

Cette volonté, ce choix ne leur attribuent pas pour autant le talent, la réussite ? Pourquoi serait-ce à la collectivité de financer leur passion ?

La question mérite d'ailleurs d'être posée quant à la prise en charge par cette même collectivité, au titre « d'intermittents du spectacle,» de certains artistes ayant connu, il y a un certain temps la gloire, et ayant logiquement à ce moment-là tiré profit de leur notoriété qui aujourd'hui s'est étiolée ?

Il y a, à ce niveau, une ambiguïté

Prolonger le raisonnement pourrait amener à dire que se « lancer » dans les carrières du spectacle serait accepter d'entrer en quelque sorte dans la catégorie des artistes subventionnés ? Des artistes fonctionnaires territoriaux en quelque sorte.

Ce qui, dans certaines régions est déjà le cas

En effet des institutions départementales ou régionales, voire locales, à l'instar des grands groupes qui sévissent dans le monde économique, se sont substituées aux associations organisatrices de spectacles en créant d'autres structures dépendant directement de leur gestion. Souvent la gratuité pour le public amène à faire payer à la collectivité tout entière les choix culturels de quelques « planificateurs de la Culture » au détriment de la représentation de la nécessaire diversité. D'où à terme une stérilisation annoncée de la créativité.

Cela a d'ailleurs des effets pernicieux, voire souhaités, qui permettent à « l'artiste bien en Cour » d'accéder à des tournées bien organisées par des fonctionnaires de la Culture alors que les artistes qui vivaient, auparavant, grâce à leur talent, de leurs prestations se retrouvent nombreux à tenter de se produire dans des bars ou autres petits lieux d'expression qui se font, eux, de plus en plus rares.

La solution de l'équation est à rechercher dans ce domaine d'une autre façon

Pour gagner leur vie les artistes avec ou sans talent, doivent pouvoir se confronter au public. Cela vaut particulièrement pour les musiciens, les chanteurs, les comédiens… Or si les festivals existent, en grand nombre, particulièrement en Bretagne, force est d'admettre qu'ils ne suffisent pas à répondre aux souhaits des anciens et nouveaux talents. Ce sont très souvent les mêmes artistes qui, au fil des manifestations, « tournent en boucle ! »

Il faut redonner possibilité d'exister aux « petits lieux d'expression »

A titre d'exemple, il y a près de 30 ans il existait, en Bretagne, un très grand nombre de ces petits lieux d'expression - porteurs de lien social qui plus est. Aujourd'hui, même si il y a eu un renouveau la majorité d'entre eux a disparu.

Cela est dû, en grande partie, aux contraintes qui leur ont été imposées depuis quelques années, du fait de l'obligation légitime de mise aux normes sur les plans de la sécurité et de l'acoustique.

Il aurait fallu à ce moment-là, pour conserver, voire élargir, le potentiel des lieux d'expression – cafés-concerts, cabarets et salles de spectacle… – et pour permettre aux musiciens, chanteurs, créateurs de rôder leurs spectacles, de se former, pour leur donner la possibilité d'être mis en présence du public, de leur donner des aides concernant les travaux engagés pour répondre aux exigences prévues par les textes législatifs.

Cela n'a pas été fait et il y a péril en la demeure.

Alors demain quelle vie associative et culturelle ?


Gérard Gautier

Ancien vice-président Conseil Culturel et Institut Culturel de Bretagne

Président association Blanc c'est exprimé et membre d'associations

Voir aussi :
Cet article a fait l'objet de 1460 lectures.
L’association Blanc C’Est Exprimé a fait, depuis 1989, de très nombreuses propositions pour permettre une meilleure expression de la démocratie, rénover la vie politique et redonner une crédibilité et une légitimité aux élus dans notre Pays.
[ Voir tous les articles de Blanc c exprimé]
Vos 1 commentaires
Jean Kergrist Le Mercredi 31 août 2011 18:00
Voici, pour illustrer la tribune de Gérard Gautier, un texte que j'ai prononcé au colloque Taol Kurun le 22/01/05 (il y a donc 6 ans) sur le sujet du pouvoir artistique (Le texte intégral est toujours sur mon site perso à la rubrique "JK, sa vie son œuvre" ). A force de répéter ce constat dans le vide, j'ai fini par me lasser et j'ai préféré quitter la scène.

" Le montage politique de ces fausses associations est d'une grande simplicité. La ficelle de l'instrumentalisation est tellement grosse qu'elle en est déconcertante. En résumé : un élu se vote le matin une grosse subvention qu'il va chercher l'après-midi avec sur la tête une autre casquette, celle de Président de la pseudo association.
Cette prise illégale d'intérêt, pourtant passible, en droit, des tribunaux, n'étonne plus personne. Quant le pouvoir local est à gauche, les syndicats (en général de gauche) préfèrent se taire plutôt que de donner des armes à la droite. Et la droite aussi se taît, parce que son intérêt, une fois au pouvoir, est de faire la même chose, sinon en plus efficace, c'est-à-dire en pire.
Pour bien verrouiller le dispositif, la dernière astuce consiste à favoriser une syndicalisation massive des salariés de la structure officielle, trop heureux de consolider leur emploi en se mettant ainsi à l'abri.
Face à cette distorsion de concurrence, les vrais artistes ne peuvent lutter à armes égales, c'est-à-dire avec les mêmes moyens financiers. Surtout quand, en face, on en arrive à proposer au public une multitude de spectacles gratuits, le prix des entrées n'entrant dans le budget de ses organismes que pour des pourcentages plus que modestes (pas plus de 5 à 7% parfois).
De temps en temps on s'arrange à les faire taire en leur offrant un petit lot de consolation : un copinage, une programmation par ci, une petite subvention par là.
Mais le gros des moyens va désormais à ces médiateurs patentés, qui ne tiennent leur pouvoir que de leurs maîtres (et non d'un vote libre d'une association en A.G.) et qui, par répercussion, exigent des artistes même soumission et même allégeance à leurs propres goûts formatés.
En face, ceux qui osent encore manifester leur indépendance ou jouer les empêcheurs de tourner en rond sont vite éliminés ou renvoyés péjorativement au qualificatif "d'artistes aigris".
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