Conférence par Aurélie Epron
Le gouren, ou lutte bretonne, est un lieu de mémoire qui n'est pas seulement « ce dont on se souvient, mais là où la mémoire travaille ; non la tradition elle-même, mais son laboratoire. » (Nora P., Les lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 1984, p. X).
L'étude s'attache à éclairer l'histoire d'une pratique de lutte traditionnelle en Bretagne, le gouren, en questionnant son ancrage dans la culture bretonne, à partir de questions en apparence simples : Qu'est-ce que le gouren ? Comment une pratique traditionnelle survit-elle au temps qui passe ? Quelles significations revêtent ses mutations ?
Il s'agit d'une part de mettre au jour le passé d'une pratique, les étapes et les transformations qui ont jalonné et façonné sa trajectoire, défini les rôles des acteurs, la sociologie des pratiquants et des institutions au cœur de l'espace breton ; alors même que la nation et la société françaises privilégient des modèles concurrents de cultures corporelles (gymnastiques et sports par exemple).
Il s'agit conjointement de s'attacher à l'étude des positions, discours, revendications des acteurs qui font de la lutte bretonne le lieu d'un investissement identitaire et l'espace de reconstruction d'une mémoire réactivée au nom de la bretonnité, de la tradition, d'un passé idéalisé, reconstruit et en partie réinventé (au sens que donnent Hobsbawm et Ranger, 1983).
Finalement, le gouren, devenu sport traditionnel est bien le lieu où se joue, en grande partie à partir des années trente, une complexe alchimie entre le désir de pérenniser une tradition de lutte, issue de pratiques communautaires, en reconfigurant sportivement ses usages et, d'autre part, la volonté d'en appeler à la pureté des luttes d'antan qui ont fait et font l'originalité d'une région, quitte à en réinventer les usages et les traditions. Une relation ambiguë entre tradition et modernité, entre passé et présent, qui, encore aujourd'hui marque de manière polémique la définition culturelle et/ou institutionnelle légitime de la lutte bretonne.
Vendredi 5 mars à 20 heures, salle du Petit Théâtre à Pontivy
Gratuit
Renseignements : 02 97 68 31 10