Deux députés du parti pro-kurde BDP (Parti pour la paix et la démocratie), Selahattin Demirtaþ, co-président et Pervin Buldan, vice-présidente, ont été autorisés à se rendre à l'île-prison d'Imrali, où Abdullah Öcalan, président du PKK, purge une peine de prison à perpétuité. C'est la dixième fois qu'une visite de parlementaires est autorisée. La volonté d'Abdullah Öcalan est de passer à une phase plus active, celle d'une recherche par le dialogue d'un processus de paix doit maintenant déboucher sur de vraies négociations :
"je pense que le processus de dialogue que nous avons commencé il y a un an doit être poursuivi avec un nouveau format et, en d'autres termes, déboucher sur des avancées significatives. J'ai déjà fait des propositions dans ce sens, tant en direction des autorités turques que des responsables de Qandil [chaîne de montagnes dans le nord de l'Irak, où sont retranchés des combattants du PKK]. Il est essentiel que l'Etat crée les conditions d'une négociation en profondeur".
Le plan convenu entre Öcalan et Ankara, appelé « processus de paix », comporterait trois phases dont la première commencée en avril implique le retrait de Turquie des combattants du PKK. La deuxième, qui se fait attendre, devrait être un ensemble de mesures de démocratisation à l'initiative gouvernementale, tandis que la dernière phase aurait pour finalité le retour en toute sécurité dans leurs foyers des militants et des combattants.
Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan estime à 20% le retrait des troupes du PKK : seuls « des vieux et des enfants », selon ses mots, auraient quitté le pays, précisant par ailleurs qu'une amnistie générale pour les rebelles, notamment pour A. Öcalan, et le droit à l'éducation en kurde n'étaient « pas d'actualité ».
« Nous risquons de sérieux problèmes », avait prévenu fin août Selahattin Demirtaþ avant que le PKK lance son ultimatum de suspendre son retrait du territoire de Turquie, menace mise à exécution début septembre - tout en maintenant la trêve des armes - et reportant l'entière responsabilité de cette décision sur les tergiversations du gouvernement d'Erdogan.
Abdullah Öcalan réitère sa volonté de ne pas mettre fin au dialogue mais de dépasser cette phase pour entamer de vraies négociations, rappelle Pervin Buldan qui confirme que le « processus de paix » en cours n'est pas rompu :
"j'en veux pour preuve la poursuite du cessez-le-feu, mais M. Öcalan, en tant que l'un des négociateurs, doit pouvoir rencontrer d'autres interlocuteurs que des membres de sa famille. Il doit pouvoir rencontrer ses avocats et, outre les députés du BDP, il doit pouvoir rencontrer d'autres délégations, les médias et les organisations de la société civile. C'est alors qu'on pourra commencer à parler de négociations."
André Métayer