Le président Erdoğan n'a pas encore compris l'onde de choc provoquée par la résistance kurde à Kobanê, assiégée depuis 45 jours par les fous djihadistes du prétendu "Etat islamique" (EI) : "pourquoi les Occidentaux s'intéressent-ils tant à Kobanê ? Pourquoi Kobanê ? Y a-t-il de l'or, des diamants à Kobanê ?" L'ironie dont il a fait preuve, lors d'une rencontre à Paris organisée par l'Institut français des Relations internationales le 31 octobre, cache mal son embarras : sa position ambiguë vis-à-vis de ces islamistes radicaux est de plus en plus intenable. La duplicité dont il fait preuve commence à dessiller les yeux de ses meilleurs soutiens. Elle montre que sa vision moyen-orientale, le fameux "modèle turc" qui devait représenter la modernité dans le monde arabo-musulman, est à courte vue. Il aurait dû être le premier défenseur des Kurdes de Syrie contre le danger que représente l'EI. La mobilisation massive du 1er novembre devrait faire réfléchir ses alliés de l'OTAN. L'opinion internationale reconnaît aux combattants de Kobanê le mérite d'avoir résisté à l'oppresseur djihadiste et le droit d'exister en tant que peuple.
De nombreuses manifestations se sont déroulées en Turquie, organisées à l'appel du Parti démocratique du peuple (HDP?) à l'occasion de la journée mondiale "Urgence Kobanê", notamment à Istanbul, Izmir, Ankara et dans les principales villes des provinces kurdes. La mobilisation a été très forte à Diyarbakir, Van, Batman, Hakkari et dans toutes les villes et villages situés en bordure de la frontière syrienne. Le rassemblement à Suruç, situé en face de Kobanê, a été impressionnant. On note également des manifestations de soutien en Inde et en Afghanistan. En Europe, la mobilisation a été exceptionnelle : Bruxelles, Londres, Oslo, Cologne, Berlin, Munich, Hambourg, Hanovre, Düsseldorf, Freiburg, pour ne citer que ces villes-là. En France, à Paris, Lyon, Strasbourg, Marseille, Bordeaux, Montpellier, des milliers de manifestants ont défilé à l'appel du Conseil démocratique Kurde de France (CDKF, ex-FEYKA), de la Coordination nationale Solidarité Kurdistan, mais aussi d'organisations politiques et d'associations des droits de l'homme.
A Rennes, un millier de Kurdes et de militants associatifs, politiques ont défilé à l'appel d'Amara-Maison du Peuple kurde, relayé par une dizaine d'organisations. A Douarnenez, les Halles, fréquentées un samedi matin par de nombreux Douarnenistes deviennent un lieu de débats et de rencontres. Des Kurdes sont venus de partout (Lesneven, Morlaix, Plouescat...). Kebab, crêpes, sardines, librairie, jeux pour enfants, photos, films, discussions avec la participation de Laetitia Gaudin-Puil, journaliste de retour du Kurdistan d'Irak et de Jean Ladan qui, lui, retourne au Kurdistan d'Irak, cette fois-ci, dans un camp de réfugiés de la frontière syrienne, avec le fruit de la collecte (1 000 euros) dans le but d'acheter des chauffages à gaz avant l'hiver. Des prises de paroles, des chants kurdes, deux cent personnes ont manifesté leur soutien à Kobanê. Michel Le Hir, secrétaire des AKB, a rappelé l'objet de cette manifestation :
"La résistance acharnée de Kobanê a ému le monde entier, a redonné espoir à tout un peuple et, au-delà, à tous ceux et à toutes celles qui, dans le monde entier, luttent pour plus de démocratie et contre l'obscurantisme. Le combat pour la défense de Kobanê revêt donc une dimension symbolique internationale."
Après avoir dénoncé l'attitude du gouvernement turc, Michel Le Hir a conclu en demandant de soutenir cette résistance et de dénoncer les violences infligées aux populations civiles.
André Métayer