Vendredi matin 31 janvier 2014, en début de matinée, des ouvriers de Marine Harvest, à Poullaouen, dont l'usine de conditionnement de saumon va être fermée sur décision de l'actionnaire norvégien, sont entrés dans le hall de la Préfecture de Quimper, coiffés de bonnets rouges, pour l'occuper. Il s'agissait d'une action symbolique et non-violente pour demander à l'État des explications sur les discussions, obscures à leurs yeux, entre le député socialiste de Carhaix, Richard Ferrand et le ministre chargé de l'agro-alimentaire, Guillaume Garot, dans les locaux de l'Assemblée nationale, la veille. Il était reproché que les personnes conviées (des dirigeants de Marine Harvest) n'avaient aucune représentativité par rapport à l'établissement concerné.
Vers 11 heures 20, la police est intervenue pour évacuer les manifestants, dont certains ont été emmenés sans résistance. Mathieu Guillemot, responsable du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) du Kreiz Breizh (autour de Carhaix), s'était adressé par une des fenêtres à la presse et demandé à Richard Ferrand de venir s'expliquer sur cette réunion "tenue dans le dos de la population". Il a estimé qu'une société faisant 511 millions de bénéfices, "n'a pas le droit de licencier".
Sorti de force, il a été allongé sur le sol et bloqué par trois policiers, l'un d'entre s'asseyant sur ses jambes. Il confiera plus tard qu'il en avait gardé des douleurs. Emmené au commissariat de police, il a été retenu plus de 4 heures et il lui a été reproché une tentative de rébellion sous la forme d'une intention de porter un coup à l'un des fonctionnaires. Il a fallu rechercher lequel des policiers aurait été « victime » de cette intention.
Un pneu incendié avait été mis à l'entrée de la rue, attirant une remarque chagrine de Daniel Le Bigot, adjoint au maire de Quimper, qui passait par là, juché sur son habituel vélo.
Une fois de plus, les réseaux sociaux ont joué leur rôle de diffusion de l'information, car, des appels à se rassembler pacifiquement devant la Préfecture ont été lancés et ont été suivis. Une délégation de 7 ou 8 employés de Tilly-Sabco (abattoir de poulets, à Guerlesquin) est venue en début d'aprés-midi, avec la déléguée CGT, Corinne Nicolle, le délégué CFDT et d'autres personnes coiffées du célèbre bonnet.
L'une des ouvrières de Guerlesquin expliquait que tous étaient très inquiets, parce qu'il ne resterait plus de travail que pour un mois, car, les aides exceptionnelles pour assurer la transition vers un poulet export non subventionné, qui ont été promises par le gouvernement et l'Union européenne ne sont pas parvenues.
Au fil du temps, d'autres Bonnets rouges sont venus stationner sous la pluie au coin de la préfecture formant un groupe permanent de 15 à 20 personnes, venues de Brest, de Bannalec et d'ailleurs. A 14 heures 45 est arrivé Christian Troadec, conseiller général et maire de Carhaix, ayant quitté la séance du Conseil général, et qui est l'un des porte-paroles du « Collectif Vivre, décider et travailler en Bretagne ». Il nous confiait, qu'à son avis, les Bonnets rouges influençait, indirectement, les propositions et postures du gouvernement depuis 2 mois. Plus tard, lui-même et trois autres personnes entamaient avec le capitaine de police, un dialogue très enjoué, qui n'était marqué d'aucune tension ou agressivité.
Vers 15 heures 35, les policiers empêchaient l'installation de pneus que certains voulaient installer sur la rue pour les brûler.
Mathieu Guillemot, libéré vers 15 heures 45, rejoignait le groupe de manifestants et échangeait longuement avec Christian Troadec perché sur l'escalier d'angle de la préfecture. Il a dénoncé, ce qu'il estime être les connivences entre la finance et le gouvernement
Le Pôle ouvrier des Bonnets rouges, qui avait fait son défilé propre à Carhaix, le 30 novembre, est donc une réalité et semble prêt à se manifester dans d'autres occasions, sur le thème du maintien de l'emploi en Bretagne. Cette action avait été décidée indépendamment du Collectif, mais a obtenu un soutien de participation des plusieurs des comités locaux.
Christian Rogel