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Un garage pour canon monumental construit par les Allemands à Pontchâteau
A Pontchâteau, près de la voie ferrée, face au bourg et près des courts de tennis de la rue du Grenebo subsiste un immense cube en béton, creux aux murs massifs
Par Louis Bouveron pour Journaliste le 15/01/12 20:08

A Pontchâteau, près de la voie ferrée, face au bourg et près des courts de tennis de la rue du Grenebo subsiste un immense cube en béton, creux aux murs massifs. Ce cube est un bunker qui abritait un canon, un gros canon montée sur rail.

L'abri à canon sur rail de Pontchâteau

Pontchâteau est installé autour du Brivet, dans sa boucle, et est bordé au nord par un massif affleurement rocheux qui forme un arc autour de la ville et de ses abords. Une motte se trouve en face, sur laquelle se sont juché dans les âges l'église, le prieuré et le château dont il ne reste rien. La voie ferrée traverse la ville selon un axe nord-sud et passe le Brivet sur un pont avant de s'engouffrer dans un tunnel et d'émerger devant la gare.

A leur arrivée, les Allemands commencent l'installation de cinq batteries d'artillerie côtière dépendant du Marine-Artillerie-Abteilung 280 (MAA 280). L'une d'elle est installée auprès du moulin de Kermoisan en Batz-sur-Mer. Elle est armée de deux canons français de 240 mm Schneider Mle 1893-96 M « Colonies » qui proviennent du parc de réserve générale d'artillerie de l'armée française. Saisis par l'armée allemande à l'armistice en 1940, ils ont été emportés en Allemagne pour être testés avant d'être remis en service sur l'Atlantique. Dès leur arrivée fin 1941, les soldats de la 4e batterie s'installent autour du Moulin de Kermoisan où une dizaine de baraquements en bois sont construits, principalement pour le logement.

L'Organisation Todt va ériger un véritable camp retranché protégé par un double réseau de barbelés, les alentours sont minés. Les canons, tirant à raison d'un coup toutes les quatre minutes et de façon très imprécises, sont surtout là pour un effet dissuasif bien qu'ils portent à 18 km. (voir le site)

Début août 1944, la Poche de Saint-Nazaire, c'est-à-dire le port et soixante kilomètres de terre bretonne à l'est, de la Roche-Bernard à Cordemais suivant le canal de Nantes à Brest, puis tirant droit dans les landes depuis Fession (commune de Saint-Omer de Blain) jusqu'à la Loire, puis au sud, de Rouans à Pornic, est encore allemande. Il faut protéger l'arrière de la Poche, le plus grand danger vient en effet de la terre. C'est pourquoi l'une des deux pièces sur rail de Kermoisan est envoyée à l'arrière, pour profiter des voies ferrées – intactes – de la Poche.

C'est justement parce que Pontchâteau était un nœud ferroviaire important que les Allemands décidèrent d'y construire un abri pour un canon de 280 mm posté sur un train blindé. Le prieuré fut occupé du 22 juin 1940 au 11 mai 1945 par les Allemands. L'abri en question se trouve au fond des carrières du Grenebo, un peu à l'ouest de la tranchée dans laquelle passe la voie ferrée de Savenay à Redon. Il est raccordé à la voie ferrée. Au sud du Pontchâteau se trouvent deux bifurcations, l'une pour la ligne allant de Pontchâteau à Montoir-de-Bretagne, l'autre donnant sur l'ancienne ligne vers Châteaubriant, les deux tronçons étant les deux parts de l'ancienne ligne du réseau de l'Etat Châteaubriant – Saint-Nazaire.

Les Allemands réutilisent une galerie qu'ils avaient creusées pour le stockage et le montage de mines magnétiques. Jamais terminé, l'ensemble des galeries n'est que très peu bétonné sauf la partie abritant le canon de manière épisodique à la fin de la guerre. La carrière fut remise en activité après la guerre, isolant l'abri du canon. Le reste des galeries est fermé et extrêmement dangereux du fait de son abandon depuis plusieurs années. Sur la colline se trouve un poste de tir pour mitrailleuse Vf58c, accessible par un escalier taillé dans la roche, à côté de la voie SNCF (aujourd'hui clôturée). Des photos de la casemate et des galeries sont visibles ici (voir le site)

Des emplacements de tir lui sont aménagés à Campbon et à Besné, le canon peut aussi tirer à la sortie de la gare de Savenay, où il a d'ailleurs été retrouvé à la reddition de la Poche le 11 mai 1945. La pièce d'origine française aura bombardé les lignes françaises et américaines qui contiennent la Poche jusqu'au 6 mai 1945 et serait le dernier canon de l'artillerie lourde sur voie ferrée française à avoir tiré pendant la guerre !

L'abri du canon présente un aspect cubique et massif. Pour la protection rapprochée, une caponnière de tir est aménagée de biais à l'accès principal. Tout près se trouve une soute à munitions bétonnée semblable à celle que les Allemands aménagent au même moment près le pont de la Roche-Bernard (voir le site) Il est actuellement abandonné et tagué dans ses parties basses, mais sinon relativement intact, hors ses pièces blindées (portes, créneau de tir… qui ont été ferraillées après la guerre).

Voilà encore un vestige de l'histoire si particulière de la Poche de Saint-Nazaire qui a été respecté et qui mérite d'être connu. Nombreux sont les anciens qui se souviennent de la Poche, d'août 1944 à mai 1945, qui fait de Saint-Nazaire et de l'ouest de la Loire-Atlantique la dernière terre libérée d'Europe (voir le site) Interrogez-les et faites vivre le souvenir.

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