Surprenant ! On en parle beaucoup de ce mouvement sur le web, remarquable certes par le nombre et la rapidité des connexions, remarquable aussi par la provenance de ces connexions. Celles-ci proviendraient du monde entier.
Pas si surprenant que cela en fait, quelqu'un disait que chaque vague de l'océan dissimulait un Breton, et c'est vrai que partout dans le monde on peut croiser un Breton, ou une Bretonne, d'ailleurs.
Contraintes économiques, appel du large, curiosité, les raisons de cette dispersion sont nombreuses et historiquement très anciennes, qui viennent expliquer cet appétit de l'ailleurs de nos concitoyens.
Bernard Le Nail, qui vient de disparaître, y avait consacré plusieurs ouvrages. Le Breton est voyageur, il aime ça et le fait partager aux autres comme les créateurs du Guide du routard. La plupart des écrivains et artistes de Bretagne ont parcouru le monde comme Victor Ségalen, Yves Tanguy ; d'autres sont nés ailleurs comme Jean-Marie Le Clezio, ou Jack Kerouac mais reviennent en Bretagne, d'autres comme Irène Frain voguent sur les traces des aventuriers bretons.
Pas surprenant non plus qu'une terre, où se côtoient le mysticisme et la foi (généralement chrétienne), mais aussi l'humanisme, le laïcisme militant, la soif d'aventure, de gloire, sans oublier l'esprit d'entreprendre et de réussir dans les affaires, enregistre un tel appétit pour le voyage.
Autre élément d'explication, c'est un poète qui en a livré la clef, Saint-Pol-Roux, lorsqu'il déclare "Bretagne est univers", (et pour rester sur l'univers n'oublions pas qu'un Breton Jean-Loup Chrétien est y déjà allé, poursuivant ainsi la lignée ininterrompue des découvreurs bretons). C'est aussi cela qui fait que les Bretons se sentent partout chez eux.
Le fruit d'une histoire commune explique cet engouement pour la planète. Ce qui demeure plus surprenant c'est que cet acte, le plus souvent individuel, se traduise par un aussi fort sentiment d'appartenance à une terre, qui n'est plus un pays.
Comme disait Léo Ferré "Et pourtant ils existent". Nés en Bretagne ou pas, de sang breton ou pas, ils se déterminent comme Bretons revendiquant un lien avec cet univers qui, entre le Mont Saint Michel, Nantes et Ouessant , constitue un monde à part, un monde vivant aussi là où sont présents des Bretons.
Elle est ici, la singularité, c'est sans doute la force de l'imaginaire breton, la matière de Bretagne comme on dit depuis le cycle du Graal, qui suscite ce phénomène et la liste infinie des paradoxes de Bretagne, le moindre étant de constater que l'individualisme farouche des Bretons les pousse à pratiquer une solidarité, non seulement entre, mais vers les démunis d'où qu'ils soient. À témoin sur facebook, les appels à la solidarité avec les Haïtiens.
Une raison supplémentaire s'il fallait d'aimer la Bretagne.
Alors, au-delà du jeu sur facebook, se dissimule une réalité qui ne relève pas seulement du virtuel mais puise son fondement dans la matière de Bretagne.