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- Lettre ouverte -
Réunification : lettre ouverte à Christian Guyonvarc'h
Christian, Je conçois fort bien qu'à la veille d'une future élection, qui plus est régionale, ta position « de politique » soit différente de la mienne « de militant ». Tu défends l'idée que pour obtenir la réunification de la Bretagne, il faille passer par la voie législative en s'appuyant sur la loi de décentralisation. Je respecte ta position, dans le même temps où je réaffirme, quant à moi, ma ligne de conduite, à savoir que « ce qu'un décret a fait, un décret peut et doit le défaire »
Par Gérard Gautier pour Blanc C Exprimé le 7/10/09 7:46

« Le courage est de chercher la vérité et de la dire » Jean Jaurès

Christian,

Faute d'en avoir été de ta part, rendu destinataire, je viens de prendre connaissance grâce à un ami qui me l'a transmise, de l'analyse que tu as faite et diffusée après l'appel à pétition « pour la réunification » que j'ai lancé la semaine passée. Ne sachant pas à quelles personnes tu as fait parvenir ton envoi, je me crois en droit de diffuser largement la présente lettre ouverte.

Je conçois fort bien qu'à la veille d'une future élection, qui plus est régionale, ta position « de politique » soit différente de la mienne « de militant ». Tu défends l'idée que pour obtenir la réunification de la Bretagne, il faille passer par la voie législative en s'appuyant sur la loi de décentralisation. Je respecte ta position, dans le même temps où je réaffirme quant à moi, ma ligne de conduite, à savoir que « ce qu'un décret a fait, un décret peut et doit le défaire ».

Bien qu'étant républicain et légaliste, je suis de ceux qui considèrent toutefois qu'une loi n'est pas « figée dans le marbre » et peut être appelée à évoluer… en fonction de l'état de la société ou de ce que l'on veut la voir devenir. Ainsi et pour preuve les nombreuses modifications apportées à celle que tu évoques depuis son vote en première lecture à l'Assemblée nationale dès le mois d'août 1981 et sa promulgation à la loi de décentralisation du 2 mars mars 1982 sous le titre " loi relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions ".

Une autre raison d'une évolution qui peut être souhaitée « est lorsqu'une loi n'est pas bonne ou a été élaborée… pour aller à l'encontre du respect de la démocratie et qui est donc, de ce fait porteuse de graves discriminations culturelles, linguistiques et d'atteintes aux droits de l'Homme ».

Ce qui me semble être évident, dans le cas présent ?

Or la loi (et ses modifications) à laquelle tu fais référence et que tu défends est justement celle qui m'a amené à avoir la position qui est la mienne depuis une dizaine d'années.

En effet, votée en 1996 sous le gouvernement RPR (devenu UMP) de Alain Juppé, cette loi n'a pas été remise en cause - s'il l'avait souhaité - par le PS sous le gouvernement de Lionel Jospin entre juin 1997 et le 6 mai 2002 ?

Je n'ai pas motif à mettre en doute la sincérité de l'engagement des nombreux élus bretons favorables à la réunification comme, entre autres, Patrick Mareschal, Jean-Yves Le Drian, Marc Le Fur ou François Goulard mais par contre j'émets des réserves quant à leur influence réelle auprès des appareils des partis jacobins auxquels ils appartiennent.

Aussi, selon moi, en passer par la voie de la loi est aller dans le sens de la crainte exprimée il y a quelques années par Jean-Yves Le Drian, sous forme de boutade, de voir ( ?) la réunification ne se réaliser « qu'à l'échéance d'une… quarantaine d'années ». C'est donc une voie suicidaire et je ne parle même pas d'un éventuel référendum !

J'en veux pour preuve les suites données (?) aux différents votes de vœux du Conseil régional de Bretagne, dont celui que j'ai présenté en 1997 et qui a été voté à l'unanimité moins une abstention, et celui du Conseil général de Loire-Atlantique.

C'est pourquoi au lieu « de continuer à nourrir », comme tu m'accuses de le faire, « des chimères qui ne peuvent que conduire à des déceptions » je réaffirme quant à moi, réaliste, que le débat s'instaure réellement à partir sur la base énoncée à savoir : « ce qu'un décret a fait, un décret peut et doit le défaire ».

Lorsque tu écris « Il est justifié de faire référence au caractère antidémocratique du décret de 1941 dans tout argumentaire en faveur de la réunification administrative de la Bretagne. Mais il est vain d'espérer convaincre les Bretonnes et les Bretons de 2010 encore hésitants à partir de cet argument-là » dois-je entendre par là que tu ne marques pas un profond respect pour les Bretons et à leur capacité d'analyse personnelle ?

En fait ta volonté n'est-elle pas de leur demander de ne plus évoquer le nom de Vichy et de Pétain ?

En agissant ainsi ne donnes-tu pas du crédit à ceux qui, à l'instar de Gérard Charasse (député UMP de l'Allier) qui a déposé une proposition de loi en 2003 visant substituer à «Etat de Vichy »… « la dictature de Pétain » ou pire, aller dans le sens de sa précédente proposition de loi de 1999 visant elle…« à interdire l'utilisation abusive (?) du nom de Vichy ?

Es-tu de ceux qui souhaitent , négation de l'Histoire, oublier que « Vichy et la Bretagne ont destin lié par… l' Histoire ».

Ce qui ne rend pas, pour autant à mes yeux, responsables de ce qui s'est passé dans leur Ville, les habitants de la Station thermale, mais devrait, au minimum interpeller ses édiles

Or l'appel lancé vers Claude Malhuret, maire de Vichy et ancien secrétaire aux droits de l'Homme (le seul que la France ait jamais eu !) lors de la pose de la première pierre « du Mur de la honte de Vichy » à Redon le 30 juin 2001, a été de sa part, oublieux d'un minimum d'esprit de solidarité, de demander « le changement de nom de cette initiative » qu'il n'a d'ailleurs remise en cause.

Il a seulement suggéré de le remplacer par «Mur de la Honte de Philippe PETAIN»…

Aussi comme les Québécois je dis : « Je me souviens »…

Tu as également dit :

« Les arguments qui convaincront il faut les rechercher dans la Bretagne d'aujourd'hui et elle n'en manque pas: vitalité de la culture bretonne en Loire-Atlantique, adhésion des entreprises de Loire-Atlantique à Produit en Bretagne, la réunification au service du dynamisme maritime de la Loire-Atlantique et de toute la Bretagne, manifestation d'une volonté de réunification dans les collectivités (conseil général de Loire-Atlantique, Conseil régional de Bretagne...), investissement des Bretons de Loire-Atlantique dans les associations de la diaspora (Bretons du Japon, BZH New York...), intégration de la Loire-Atlantique dans les guides touristiques et culturels étrangers consacrés à la Bretagne, etc ».

La démarche qui est la mienne a anticipé depuis longtemps tes propos que, bien sûr, je cautionne. En effet, en ma qualité d'acteur de la vie économique, culturelle et associativce, je milite depuis 1960 au rapprochement de l'économie et de la culture.

Pour confirmation, je me plais à souligner qu'en juin 2001, l'association Produit en Bretagne diffusait un communiqué de presse :

Après avoir rappelé que " sa vocation était le rayonnement de la Bretagne s'appuyant sur un référent identitaire fort, qu'elle prenait en compte les cinq départements bretons, qu'elle avait pour objet le développement de l'emploi en Bretagne par la promotion des produits fabriqués ou assemblés dans la région, des services créés ou développés dans la région. " Elle ajoutait « que le développement économique de la Loire-Atlantique, partie intégrante de la Région Bretagne était, pour Elle, un souci permanent."

Pour la petite histoire l' Association "Produit en Bretagne" forte à ce moment-là de 116 entreprises et de 75000 salariés venait ainsi de répondre positivement à la demande que j'avais présentée à son président Jean-Claude Le Gall, grâce à l'intervention de son président actuel Jacques Bernard, cela en ma qualité de vice-président mandaté du Conseil Culturel de Bretagne (alors association « non partisane » indépendante) en charge du dossier "réunification" . Au cours de notre réunion j'avais évoqué ma vision concernant le rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne et leur indispensable implication publique dans le champ de la démarche.

J'avais évoqué, pour convaincre - je dois l'avouer sans avoir eu besoin de beaucoup argumenter - que l'avenir de la Région Bretagne réunifiée, fortement identifiée sur le plan culturel allait se jouer dans les prochains mois et que, connaissant l'importance de l'impact de "l'image positive de la Bretagne" dans l'internationalisation de ses échanges," le "monde des entreprises" était directement concerné par l'évolution du dossier qui ne devait pas être traité et soutenu seulement par le pouvoir politique représentant les Bretons. Ils avaient pris la dimension des risques que faisait courir l'avènement d'un Grand Ouest artificiel sur la pérennité même de l'association et sur les emplois.

Je souhaite qu'à la lumière des éléments énoncés tu puisses comprendre ma démarche.

Je voudrais que la position que tu as prise à la suite de mon appel à pétition ne soit pas de nature à entraver son succès que seul justifie, pour moi, l'avenir de la Bretagne et des Bretons.

Pour terminer je me permets de te soumettre le début d'un poème écrit en août 1984. Il a pour titre :

Gwenn ha Du

Je pleure sur Toi, Bretagne,

Animal mythologique géant

Assoupi sur l'échine pelée

Des Monts d'Arrée,

Au mufle blanc d'écume éclatée

Baignant dans l'Iroise.

Je tremble pour Toi, Bretagne,

Pour tes fils

Qui sont tes pires ennemis,

Tu les as enfantés à ton image

Faite de la diversité, de la mystique,

De la fierté,

Des tourments de l'orgueil,

Plus prompts à se diviser

Qu'à s'unir,

Aidant, suicidaires, ceux

Qui veulent leur porter atteinte.

…/…

Gérard GAUTIER

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