ABP : votre première réaction suite au vote positif sur l'amendement à l'Assemblée nationale ?
Christian Guyonvarc'h : Il faut féliciter ceux qui en ont pris l'initiative et ceux qui, sans y avoir été associés, ont voté pour. C'est une avancée réelle car l'amendement déposé vise à permettre à un département de choisir librement sa région de rattachement, ce que le code général des collectivités territoriales ne permet pas en l'état.
ABP : Comment peut-on analyser ce vote ?
Christian Guyonvarc'h : Le clivage droite-gauche a été dépassé, c'est une bonne chose. C'est nécessaire pour aboutir positivement sur un sujet comme la réunification administrative de la Bretagne, comme ça l'est aussi sur la question des langues.
ABP : Ce vote intervient après celui à l'unanimité du Conseil général du Morbihan.
Christian Guyonvarc'h : Je pense que son initiateur, François Goulard, est sincère sur la question. Il s'était déjà exprimé sur le sujet par le passé. Qu'il y ait une arrière-pensée électorale liée à son échec aux récentes sénatoriales et aux craintes qu'il peu avoir quant à son siège de député, c'est possible sinon probable, mais si ça permet de faire avancer une cause juste comme celle de la réunification, c'est secondaire.
ABP : Quelles peuvent être les suites de ces deux votes ?
Christian Guyonvarc'h : Ces deux votes donnent de la légitimité à la revendication d'une réunification administrative, ce qui est déjà une bonne chose en soi. Le vote de l'Assemblée nationale reconnaît qu'il n'est pas acceptable de conditionner la réunification, comme le fait le droit actuellement, à l'accord préalable de la région factice des Pays de la Loire, ce qui revient à instaurer un blocus. La démocratie réelle, c'est que les citoyens de Loire-Atlantique et leurs représentants soient les maîtres de la décision.
ABP : Le Conseil régional a émis régulièrement des vœux en faveur de la réunification et a mis en place une commission mixte avec la Loire-Atlantique mais on n'a pas l'impression que le Conseil régional se mobilise réellement sur ce sujet
Christian Guyonvarc'h : La commission mixte manque de dynamisme depuis les dernières élections régionales. On pourra considérer que je ne suis pas objectif sur le sujet puisque j'étais l'initiateur de cette commission mixte, qui réunit les exécutifs du Conseil régional et du CG 44, et que je n'y siège plus, mais les faits sont là. Elle ne s'est réunie qu'une seule fois en 18 mois alors qu'avant mars 2010 elle se réunissait deux fois par an. Aucune nouvelle initiative n'a été prise alors que des chantiers de coopération avaient été ouverts au cours des années précédentes: tourisme, mer, patrimoine (itinéraire des Marches de Bretagne), canal de Nantes à Brest, sport, relations internationales (Pays de Galles, solidarité internationale).
Un groupe de travail interne au Conseil régional a été mis en place en juin dernier, un an après l'adoption de son principe dans une motion que j'avais déposée et qui avait été votée à l'unanimité. Elle s'est réunie trois fois et un seul groupe a participé à ces trois réunions: le groupe UDB, le plus petit en nombre d'élus. Certains groupes n'y ont jamais mis les pieds. C'est décevant. D'un autre côté l'audition récente de "Produit en Bretagne", avec son président en exercice et son prédécesseur, a permis de prendre la mesure de certaines avancées dans les milieux économiques de Loire-Atlantique.
ABP : Le thème de la réunification pourrait-il être présent lors des prochaines campagnes électorales de 2012 ?
Christian Guyonvarc'h : Le vote de l'Assemblée nationale ne peut qu'aider à interpeller les candidats à l'élection présidentielle pour qu'ils s'expriment sur le sujet. Quant aux candidats aux élections législatives en Bretagne, ceux qui ne prendront pas position pour la réunification et qui n'expliqueront pas comment ils comptent agir partiront avec un handicap.
ABP : finalement sur ce sujet vous êtes optimiste ou pessimiste ?
Christian Guyonvarc'h : La réunification se fera, c'est une certitude. La coopération qui s'est développée entre les agglomérations de Rennes et de Nantes depuis deux ans y pousse, même si elle se réalise en dehors de tout cadre régional de régulation, ce qui tend à accentuer les déséquilibres entre l'est et l'ouest de la Bretagne. Mais l'accentuation de ce déséquilibre ne peut qu'interpeller les responsables politiques et économiques finistériens qui étaient jusqu'à présent les plus réservés à l'idée de la réunification, précisément par crainte d'un axe Rennes-Nantes qui les marginalise. Ils peuvent constater que cet axe se construit et se renforce sans eux et sans la Région plus forte politiquement et économiquement sur laquelle la réunification déboucherait inévitablement.