Ne nous y trompons pas, M. Le Foll ministre est un Français bien conforme aux stéréotypes jacobins. Seul son patronyme est breton alors que sa démarche déférente pour l'Etat français le pousse à communiquer, bien obligé par ses fonctions, avec une fausse modestie qui ne convainc personne. De plus il n'est pas tolérable qu'il se permette, même si ses coreligionnaires l'y ont encouragé, d'argumenter sans vergogne par des clichés à l'emporte-pièce. Honte et reniement de ses racines pour ne pas risquer de saborder sa carrière politique !
Provocation gratuite et opportune ou ignorance candide ? Rêvons que M. Le Foll "pays-de-loiriste" n'a pas préparé ses notes avant de bredouiller devant les caméras. Pas plus il n'a vérifié que le château des ducs de Bretagne est à Nantes, pas plus il se doute que le démembrement de notre ancien duché-état fut une décision inique.
Contrairement à ses assertions, la Révolte du Papier-Timbré dite des Bonnets-Rouge en 1675 est justement une réaction de désespoir d'un peuple écrasé d'impôts et de répression qui n'existaient pas avant que la Bretagne soit soumise au royaume de France par l'édit de 1532.
Rappelons à Monsieur le Ministre que notre petit pays était si florissant sur le plan économique au début du XVe siècle, si évolué politiquement et d'envergure internationale que la royauté française mis tout en oeuvre pour s'approprier la Bretagne, ce "Pérou" !
L'ennui est que la politique ultra centralisatrice de Versailles et de ce roi qui se prit pour le centre de l'univers causa notre perte. La révolte de 1675 était tout simplement un refus de la Bretagne de financer la Guerre de Hollande entreprise par ce vaniteux Louis XIV qu'on nous incite à vénérer aujourd'hui. Monsieur Le Foll nie par réflexe la vérité historique et le fait que la Bretagne a décru depuis son annexion à la France. Depuis lors les guerres civiles se sont succédées, l'autorité violente des gouverneurs qui se sont succédés chez nous, l'intégriste Richelieu ou pire encore le duc de Chaulnes qui persécuta nos populations, en représaille aux fameuses révoltes des Bonnets-Rouges. Cela ne vous dit rien, M. Le Foll, toutes ces familles pendues dans les chênes des villages ?
Mais l'Etat centralisateur continue ses frasques, Louis XV impose son armée dans tous les ports et les administrations de Bretagne, y lève de nouveaux impôts, en faisant fi du Traité de 1532 et malgré la résistance de La Chalotais, pour financer la Guerre de Sept Ans. Là encore des heurts et la confiscation du Parlement de Bretagne !
Puis c'est la révolution française en 1789, pour vous flatter M. Le Foll, qui ne fut qu'une bataille entre noblesse et bourgeoisie pour s'approprier le pouvoir régalien. Mais les peuples n'eurent rien à dire. La nuit du 4 août confisqua les droits imprescriptibles de la Bretagne, plutôt que les privilèges des puissants, même si la guillotine servit d'exemple ! Lors, cette nouvelle république dans laquelle vous vous drapez, Monsieur le Ministre, prétendue libre, égalitaire et fraternelle répandit l'horreur dans notre petit pays jusqu'en Vendée. Aviez-vous oublié la politique de terreur qui décima toute une région, et dont le sinistre épisode n'est surtout pas enseigné ? Or que de places Hoche au milieu de vos villes glorieuses !
Mais l'Histoire de France se répète et oublie bien vite ses velléités républicaines, puisque la monarchie dite constitutionnelle refait surface comme au bon vieux temps ! La culture francisante gangrène alors notre société bretonne, celte, par une assimilation organisée, fielleuse, distillée savamment, entre autres instituteurs formatés et aux ordres, par ces Michelet, Victor Hugo, Flaubert ou Balzac qui n'eurent de cesse de vomir leur mépris des bretons et de notre langue...
Passons sur la politique colonisatrice de Napoléon qui voulut faire de Pontivy, entre 1804 et 1815, un centre anti-breton et plus tard le racolage des hommes suffisamment vigoureux pour constituer l'Armée de Bretagne qu'on laissa pourrir près du Mans en 1870...
Voyez, M. le Foll, l'aliénation de la Bretagne depuis qu'elle est française !
Comprenez bien et inquiétez-vous de l'unité bretonne vue à Quimper dernièrement, ce ciment social, sociétal devrais-je dire, qu'on ne voit qu'en Bretagne, et qui n'existe pas en France, c'est à dire entre la rivière de Mayenne et du Rhin, tant les Français sont individualisés ! Ce déclin que M. Le Foll dénonce est bien dû à la perte de notre indépendance, ou à tout le moins, l'absence de la moindre autonomie, la Révolte de 1675 n'étant qu'un signe. Et ce ne sont pas les incantations de l'article III de la Décentralisation qui vont changer quelque chose, tant l'absence d'ambition pour la Bretagne est inexistante chez nos Romains de l'Hémicycle...
Décidément le repli sur soi est typiquement français, jugez en sa misogynie, sa xénophobie, son racisme, sa jalousie du bien des autres. Et son obstination obscurantiste qui consiste à nier le peuple breton, lui-même ouvert sur le monde depuis des siècles.
Ronan Badouel, Président d'Identité Bretonne.