(J'aimerais que l'on veuille bien considérer ce texte comme optimiste.)
Jamais le gouvernement français n'acceptera de signer la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, sinon peut-être un jour dans une version ridiculement amoindrie, donc inutile.
Ce refus s'enracine, sous le règne de François 1er, dans l'ordonnance de Villers-Cotterêts imposant l'usage du français dans les documents publics ; puis, à l'origine même de la République, dans un texte du député Grégoire appelant en 1794 à anéantir les patois.
Quelques années plus tôt, le même avait déjà proposé d'offrir la citoyenneté française aux juifs, à la condition qu'ils renoncent à leur nation, c'est-à-dire à leur culture. Et c'est aussi à lui que l'on doit la première suppression de l'esclavage.
Ce mélange laisse deviner la bouillie que les adversaires du breton ont encore dans la tête. C'est qu'ils sont sincères, ces éternels jacobins, au demeurant autant de gauche que de droite ! Ils croient vraiment que c'est mal, moralement condamnable, pas seulement dangereux, de tolérer d'autres langues que le français sur le territoire de la République.
Le député Grégoire a été reçu au Panthéon… en 1989 ! pour marquer le bicentenaire de la Révolution, rien de moins. Aux Grands Hommes la Patrie Reconnaissante. C'est Jack Lang qui a prononcé le discours, sans faire aucune allusion ni aux langues régionales ni aux juifs.
Autrement dit, limiter l'action pour le breton à une lutte sans fin pour la signature de la Charte, c'est nous épuiser inutilement, c'est perdre notre temps. Elle ne sera jamais signée, ou bien elle le sera quand il n'y aura plus de bretonnants. Je propose donc de nous en moquer. Da lavaret eo, e vije koll amzer stourmañ evit ar Garta-se. ne vo morse sinet.
A quoi réserver nos forces ? Petra ober, neuze ? A l'existence du breton ! Kreñvaat ar brezhoneg, ledanaat e dachenn ! En développant les écoles par immersion, en y inscrivant nos enfants. Kreskiñ ar skolioù dre soubidigezh, lakaat hor bugale e-barzh. En multipliant les inscriptions publiques. Skrivañ gerioù brezhonek e pep lec'h. Et surtout en convainquant les militants, les sympathisants, les Bretons de c½ur qui ne le parlent pas encore de s'y mettre. Ha dreist-holl en ul lakaat ar Vreizhiz n'int ket c'hoazh da vezañ brezhonegerien.
Ce n'est pas si difficile ! Il y a des cours partout ! Et on a du goût, tiens, en apprenant ! N'eo ket ken diaes-se ! Bez' ez eus kentelioù e-leizh ! Ha plijadur a zo ganeomp o teskiñ !