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Dans Aux Champs, de Maupassant, les paysans s'expriment dans un dialecte du normand, le cauchois. Or, les auteurs des questions sont visiblement gênés par le mot de langue...
- Chronique -
Le "patois de France" en 1300 : pas tout à fait une langue ?
Colloque de Montpellier ce mois d'octobre : des mises au point nécessaires, dont celle sur le mot "patois"
Par Fanny Chauffin pour Kerne Multimédia le 15/10/17 19:57
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Colloque de Montpellier ce mois d'octobre : des mises au point nécessaires, dont celle sur le mot "patois".

Quelle définition choisir pour patois ? Quelle étymologie ? Ce mot dont aucune langue anglaise, allemande, suédoise, ... ne veut assurer la paternité en le traduisant tout simplement par "patois", tant le mot est péjoratif, trop proche sans doute d'une discrimination linguistique typiquement française dont ils souhaitent s'éloigner...

Alain Rey en 1978 dans le Petit Robert donnait une étrange étymologie au mot patois : "patt", d'où patoyer, parler avec les pattes, les mains, car le langage utilisé par le locuteur est incompréhensible, langue de faible culture, parlée sur un petit périmètre, sans civilisation.

Or, une autre étymologie existe, celle de "patria", devenue patois par élimination du "r". On trouve même, dans un texte italien de 1300, l'expression "patois de France". C'est donc la langue du pays, la langue parlée en France, sans point de vue négatif sur cette langue.

"C’eſt Brunetto Latini, Précepteur du Dante. Il compoſa un ouvragc intitulé Teſbretto, ou le petit Tréſor, en Langue Françaiſe, au commencement du treizieme ſiecle. Pour s’excuſcr de la préférence qu’il donne à cette Langue ſur la ſienne, voici comment il s’exprime : Et s’aucuns demande porquoy chis livres eſt eſcris en Romans, ſelon le patois de France, puiſque nous ſommes Italiens, je diroé que c’eſt pour deux raiſons, l’une por ce que nous ſommes en France ; l’autre ſi eſt por ce que François eſt plus délitaubles langages & plus communs que moult d’autres. "

Les deux étymologies vont cohabiter, mais en 2017, c'est majoritairement le sens péjoratif qui domine et qui institue donc une hiérarchie entre les langues : le "patois" est une langue de province, paysanne, de tradition orale, sans culture et sans littérature, de gens un peu attardés et s'oppose donc à la langue de Paris, urbaine, avec une littérature, et avec l'intelligentsia qui règle les standards, décide de gommer les accents, et les patois, ce qui fera dire à l'académicien Jean Dutourd :

"Monsieur Lang ayant créé un Capes de patois breton, pourquoi ne pas créer un Capes de mendicité ? Il y a une culture à préserver, comme on dit de nos jours. "

Mr Macron utilisera aussi avec des enfants à Port Marly, en septembre 2017, en compagnie de Stephane Bern, le mot patois, à propos de l'édit de Villers Coteret :

" On est tous Français, alors qu’on parlait souvent des patois un peu différents, et notre pays, il s’est fait par la langue. "

Plus grave, l'utilisation dans les manuels de littérature française édités en 2010 et 2016 (Nathan, Gallimard, lelivrescolaire.fr, Magnard) du mot patois, avec les questions ou affirmations suivantes :

- "Recherchez des mots de patois de votre région" (Maupassant, aux champs)

- "Le patois inverse les formes du singulier et du pluriel" (Dom Juan, Molière)

- "comique de mots (jeux de mots, grossièretés, patois)" (manuel de 6e)

Plus gênant encore, l'histoire des langues de France racontée dans ces manuels. Alors que la Délégation de la langue française et des langues de France existe depuis 1995, aucune prise en compte des recherches des sociolinguistes et des linguistes, des filières bilingues en basque, breton, corse, occitan, catalan... n'apparaît dans les manuels de français de 6e (2016) et les nouveaux programmes : le français descend directement du latin et du grec et de langues étrangères. Alors que la langue des troubadours, le "vieux français" est bien souvent de l'occitan, que les langues d'oc et d'oïl, les langues basque, bretonne, alsacienne... ont existé et co-habité et évolué, donnant le français actuel, qui n'était pas parlé par 90% de la population de France... jusqu'à la fin du XIXe siècle. Alors, mystification ? Roman national, légende ?

Voir aussi sur le même sujet : montpellier, Okitania
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Youtubeuse, docteure d'Etat en breton-celtique à l'Université Rennes 2 / Haute Bretagne, enseignante, militante des droits humains à Cent pour un toit Pays de Quimperlé, des langues de Bretagne avec Diwan, Aita, GBB, ...., féministe, enseignante, vidéaste, réalisatrice, conteuse, chanteuse, comédienne amateure, responsable depuis vingt ans du concours de haikus de Taol Kurun, des prix littéraires Priz ar Vugale et Priz ar Yaouankiz, ...
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Vos 4 commentaires
Gérard Le Berre Le Lundi 16 octobre 2017 10:53
N'y a-t-il pas une distinction à faire entre des dialectes apparentés (syntaxe, % lexical commun à des variation d'accent près. ex le Champenois) et des langues à part entière (Basque, Breton , Corse, Alsacien, Occitan ...) ?
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David Autret Le Lundi 16 octobre 2017 22:13
Très bons points soulevés dans l'article.
Le sens péjoratif du terme "patois" ne laisse aucun doute sur le site CNRTL (Centre National de Ressources Linguistiques et Lexicales).
L'utilisation du terme jusqu'à nos jours est politique et provocateur.
À mon humble avis, le terme "langue régionale" laisse lui aussi grandement à désirer. Même s'il semble plus respectueux, il n'y a qu'un pas pour ce rendre au terme "patois".
Le terme "langue de France" est-il le seul terme qui peut se valoir d'être relativement neutre dans le contexte actuel?
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Luigi Barsagli Le Mardi 17 octobre 2017 07:59
Ces débats sur "patois", "langue régionale", "langue de France" est encore un bon moyen de se mettre en position de dépendance complète et du bon vouloir de la France.
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Alain Muzellec Le Mardi 17 octobre 2017 14:15
Il est bel et bon de reconnaître que tout ce qui se parle, s'écrit,se signe est langue. Toutefois, parmi les langues d’oïl de France, il est des parentés.
Connaissant bien l'Ile et Vilaine, la Mayenne et la Sarthe, et leurs dialectes, il apparait clairement que le gallo (ou les gallos) ne s'en différencie guère,et que pour un locuteur attentif et aidé, deux journées suffisent pour les comprendre aisément ces parlers.
Ce n'est pas le cas du breton, du basque, du flamand, de l'alsacien, ni de l'occitan ou du catalan. Aussi, revendiquons les différences et étrangetés de ces langues non françaises et ne mendions pas une "reconnaissance régionale".
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