Réédition récente du livre d'Aymar de Tonquédec Au Pays des rivières En 1898, un jeune officier Breton s'enfonce dans l'Afrique inconnue.
Les éditions Lavauzelle, installée à Panazol (Haute-Vienne), viennent de rééditer récemment un livre depuis longtemps épuisé : Au Pays des rivières, paru à Paris en 1931, avec une préface d'André Citroën. Sous ce titre assez quelconque se cache en fait un récit étonnant, celui de la traversée de l'Afrique d'ouest en est, jusqu'au Nil Blanc, qu'accomplit en 1898/1899 un jeune officier breton, Aymar de Tonquédec, avec une poignée de tirailleurs sénégalais. Il ne s'agissait pas d'un mince exploit car l'intérieur du continent africain était encore très largement inconnu, il n'y avait pas de route, ni même de pistes pour traverser le continent et, bien entendu, aucune carte non plus. Son récit reste passionnant à lire aujourd'hui.
Né le 31 mars 1867 au château de Sourcéac, en Glénac, près de Redon, Aymar du Quengo de Tonquédec, avait fait ses études chez les Frères, puis au collège Saint-Sauveur de Redon. Engagé dans l’infanterie coloniale après un passage à Saint-Maixent, il avait été envoyé au Tonkin et, après l’Indochine, il avait servi à Madagascar. C'est en 1898, ayant atteint le grade de lieutenant, qu'il fut chargé de cette mission très difficile au centre de l’Afrique que relate son livre. Parti de Bordeaux le 12 juillet 1898, il avait débarqué au Congo et, accompagné d’un autre Breton, le sergent Salpin, et d’une quinzaine de tirailleurs sénégalais, il avait fait route à pied et en pirogue en direction du Nil Blanc, dans un pays sans routes, coupé de marécages et de torrents, au milieu de la forêt équatoriale ou de plateaux herbeux, n’ayant pour nourriture que le gibier, heureusement abondant. Épuisés après six mois de marche pénible, les membres de la petite colonne arrivèrent le 13 février 1899 à Kourchouk-Al. Elle pénétra dans le pays des Dinkas, entre le Bahr-el-Homr et le Bahr-el-Djebel, dans le Bahr-el-Ghazal (la mer des gazelles), immense territoire marécageux, situé dans le sud-ouest de l’actuel Soudan où elle établit un poste à Gara-Chambé.
Quelques mois plus tôt, une mission française commandée par le capitaine Marchand était partie du Congo avec l’objectif d’ouvrir une liaison ouest-est entre Dakar et Djibouti, et, le 10 juillet 1898, elle avait atteint et occupé Fachoda, petit poste soudanais situé sur le Haut-Nil. A la même époque, les Anglais, en grande rivalité coloniale avec les Français, voulait s’assurer un grand axe nord-sud allant du Caire au Cap. Kitchener (qui avait passé une grande partie de sa jeunesse en Bretagne, dans la région de Dinan) arrivait au même moment à Ondourman, à la tête d’une puissante armée anglo-égyptienne de 20 000 hommes. Son avant-garde se présenta devant Fachoda le 18 septembre 1898. La guerre fut sur le point d’éclater entre la France et l’Angleterre, ce dernier pays ayant lancé un ultimatum. Delcassé, ministre des Affaires étrangères, préfèra s’incliner et fit envoyer à Marchand l’ordre d’évacuer Fachoda, ordre qui lui parvint le 3 novembre 1898.
Le lieutenant de Tonquédec ignora cette décision et se maintint pendant un an, réduit à ses seules ressources, avec son petit groupe de Sénégalais sur le bord du Nil Blanc. Lorsque l’ordre d’évacuation l’atteignit enfin, il descendit par Khartoum puis l’Egypte, payant son voyage et celui de ses hommes avec l’ivoire des éléphants et des hippopotames tués en route.
La suite de sa carrière militaire fut plus classique. Envoyé par la suite à La Martinique, il fut cependant le témoin de la terrible explosion de la Montagne Pelée qui détruisit totalement la ville de Saint-Pierre, en 1901. Ayant démissionné de l’armée peu avant que n’éclate la Première guerre mondiale, il vint vivre à Redon mais fut rappelé en 1914 et reçut le commandement d’un régiment de territoriaux bretons. C’est lui qui le premier introduisit le biniou et la bombarde dans l’armée française, en 1915, pour renforcer le moral des soldats bretons. La guerre terminée, il quitta définitivement l’armée avec le grade de lieutenant-colonel et se retira à Nantes, puis il rejoignit en Tunisie l’un de ses sept enfants, ingénieur installé dans ce pays avec sa famille. Il mourut aux environs de Sousse, emporté par une courte maladie, le 14 février 1943. Son livre qui est vendu en librairie au prix de 50 € peut aussi être commandé directement, en ajoutant 4 € pour les frais d'envoi, aux éditions Lavauzelle : BP 8, 87350 Panazol
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