La Cornouaille britannique et le Finistère ont signé le 15 mai à l'hôtel du Département à Quimper, un partenariat, qui devrait leur permettre de bénéficier des aides européennes dans le cadre du programme transfrontalier de l'objectif européen de Coopération territoriale.
Une délégation d'une douzaine d'élus du Cornwall est venue signer ces accords à Quimper accompagnée de Doris Ansari, la présidente du Cornwall County Council, basé à Truro, la capitale de la Cornouaille britannique.
Le conseil général avait envoyé une délégation sur place l'an dernier. Nolwenn Baot fera la liaison entre le Finistère et le Cornwall.
Des relations très anciennes
À une époque où la mer était plus un lieu de communication que de séparation, au haut Moyen Âge, la Cornouaille bretonne et la Cornouaille britannique (Kernev Veur en breton) ont fait partie du même royaume. C'était l'époque du fameux roi Marc'h rapporté dans la légende de Tristan et Iseult, qui siégeait d'après la légende arturienne à Tintagel dans le Cornwall actuel.
L'ancien Penthièvre breton aurait aussi fait partie d'un royaume commun appelé Domnonée. Un territoire acquis en Armorique au Ve siècle par le roi Riwal qui régnait aussi sur la Domnonée britannique (aujourd'hui le Devon). Le légendaire bad boy barbebleuesque, roi Konomor, aurait aussi régné sur des possessions des deux côtés de la Manche.
Les ducs de Bretagne entretenaient des relations étroites avec le royaume d'Angleterre. Relations étayées régulièrement par des traités (ces traités existent dans les collections "archives du duché" conservées aux archives départementales à Nantes). Du temps de l'indépendance du duché, le commerce breton fleurissait à travers la Manche et les bateaux bretons allaient du Portugal à la Suède exportant sel, poissons séchés et toiles. Les voiles de la marine de sa majesté le roi d'Angleterre venaient même des fabriques de toiles bretonnes réputées à travers toute l'Europe.
Un blocus continental de quatre siècles
Après l'annexion de la Bretagne par le royaume de France en 1489 et le décret d'union de 1532, le commerce florissant entre les Bretagnes arriva progressivement au point mort. Les guerres incessantes entre le royaume de France, puis l'empire, contre l'Angleterre, les blocus continentaux, les rivalités coloniales entre les deux empires vinrent à bout de relations séculaires, voire millénaires. Ce n'est qu'avec l'Entente Cordiale signée en 1904 entre la France et l'Angleterre que le pendule commença de basculer de l'autre côté.
Jeter des ponts
C'est grâce en particulier à l'initiative d'Alexis Gourvennec, fondateur de la Brittany Ferries (BAI) en 1972, que les relations commerciales entre la petite et la grande Bretagne ont pu reprendre. Créé la même année, le Festival Interceltique de Lorient a aussi joué un rôle essentiel dans le renouveau des relations entre les deux Bretagnes.
L'entrée du Royaume-Uni dans l'Europe en 1973 est un tournant important qui va ouvrir de nouvelles portes.
Plus récemment, le 15 janvier 2004, la Région Bretagne et le Pays de Galles ont signé un protocole d'accord pour développer la coopération dans les domaines de l'économie, de la formation et de la culture.
De son côté, la compagnie aérienne lowcost irlandaise Ryan Air est en train de faire, pour le transport aérien, ce que la Brittany Ferries avait fait pour le transport maritime : rétablir des ponts. Ryan Air a établi des routes entre Brest et Dublin ou Londres, entre Dinard et Londres, Birmingham ou Bristol, et entre Nantes et Dublin, Shannon, London ou Bournemouth. Une autre low cost irlandaise, Aer Aran a établi des routes entre Lorient, Cork et Galway. La Bretagne n'est plus une enclave.
Philippe Argouarch