Une nouvelle étoile brille de tous ses feux dans le firmament, celle de Jean Jacques Le Goarnig, le preux chevalier de la Bretagne, le guerrier de lumière lancé à l'assaut de la reconquête des droits imprescriptibles de son pays. Né le 6 janvier 1928, il vient de rendre son âme à Dieu, à l'aube du 6 mai 2013, sa main dans la mienne, à son domicile, rue de la Belle Angèle, à Pont Aven. Ses quatre vingt cinq printemps épargnaient son esprit, sa volonté, son âme, mais non son corps, atteint, hélas, d'une grave lésion.
Nous avons vécu dans une parfaite symbiose et aujourd'hui encore, je peine à réaliser son départ tant il émanait de vitalité, de force et de courage, de sa personnalité. J'étais sa vestale, une vestale des temps modernes. Je veillais sur son souffle.
Il aimait la Bretagne de toutes les fibres de son être, viscéralement, comme son ami Glenmor, son alter ego sur le chemin de la vérité lancée à tous les échos, pourfendant l'obscurantisme par le réveil des âmes. Dans ses rêves les plus beaux, Le Goarnig Kozh voyait son pays gravir les pentes de l'indépendance, panser ses plaies. Il y a loin de la coupe aux lèvres, nous le savons tous. Pourtant la foi renverse les montagnes, la passion galvanise et de son Tir na n'Og celte, pays de l'éternelle jeunesse, Jean Jacques Le Goarnig verra un jour se concrétiser son idéal et ses ambitions pour son pays breton.
Il se distinguait par ses hautes valeurs morales, son caractère exempt de médiocrité, de bassesse, sa loyauté à toute épreuve. Il évoluait en altitude, toujours, élevant son âme vers les plus hauts sommets. Ses amis, conquis, l'y rejoignaient.
Outre l'odyssée de « l'Affaire des Prénoms bretons », il s'était fait le chantre de nombreux combats en faveur de son pays. Comme un catalyseur de forces, il attirait à lui un véritable vivier de talents et de compétences, d'esprits libres, fiers de leur identité, les drainait dans sa prime jeunesse vers ses entreprises parisiennes axées sur le bâtiment et la logistique et recueillait leurs idées génératrices d'un avenir meilleur pour la Bretagne. Les plans novateurs s'édifiaient alors autour de ces idées foisonnantes dans un bouillon de culture sans cesse renouvelé. Ensuite, tout au long de son existence, Jean Jacques le Goarnig, inébranlable au sein d'un mælström bouillonnant, s'est évertué avec acharnement à donner à la Bretagne les moyens de progresser dans la voie de la renaissance, de consolider ses forces et ses défenses, de sauvegarder sa culture écrite et orale, l'originalité de sa richesse linguistique, son intégrité et son identité, etc.Il appartenait à la section "Droit et Institutions" de l'Institut Culturel de Bretagne, posait avec Per Le Moine les premiers jalons d'une "Fondation de Bretagne",échangeait constamment des idées avec Louis Melennec, Jean Cevaer, Yves Lainé et bien d'autres piliers du réveil breton. Infatigable, il ne baissait jamais la garde.
Afin de mieux éclairer votre lanterne à ce sujet, je vous propose la lecture de deux de mes écrits publiés dans l'Agence Bretagne Presse ( Présentation du livre Bretagne Libre et hommage au Breton Youenn Craff )
Visionnaire, passionné, Jean Jacques Le Goarnig conçut le rêve,au soir de sa vie, de convertir à Pont Aven, la "Cité des peintres", un ancien site industriel en "Pôle culturel et artistique", avec comme clef de voûte le Musée Paul Gauguin.Ce nouveau poumon dans la ville, situé en face du Bois d'Amour, si cher à Gauguin et à ses émules, il l'imaginait superbe, flanqué d'une majestueuse hermine, comparable au Musée Guggenheim de Bilbao. Son projet inachevé refleurira sous d'autres formes.
Il ne vivait pas en reclus. Il recevait ses proches, les membres de sa famille installés à Kertalg ou à Keranperc'heg, avec une même spontanéité, un bonheur égal. Ses amis du mouvement breton, que je me garderai de citer, tant ils sont nombreux, de crainte d'en oublier, lui tenaient à coeur tout particulièrement. Tel un diamant aiguisé, un prisme lumineux, il projetait avec acuité les reflets de ses pensées, de son énergie, de son amour, sur son pays, la Bretagne.
Son souvenir demeurera inaltérable et impérissable. Sa perte m'est infiniment douloureuse comme à tous ceux et celles qui l'ont connu et aimé. Le seul remède à cette blessure profonde est de lui donner asile dans nos âmes et de lui accorder toute latitude de s'y reposer en confiance. Son génie tutélaire continuera à protéger les siens.
Le Goarnig Kozh, chêne breton géant, aux racines profondes et fécondes, aux branches innombrables et fertiles, le grand timonier guide maintenant ta barque vers les eaux de la vie éternelle, la blanche hermine lovée à tes pieds et le drapeau breton dressé à tes côtés. A Galon, Jean Jacques, mon phare lumineux à tout jamais. Nous nous retrouverons.
Je remercie tout spécialement Katell Le Goarnig, une de ses filles, qui m'a aidée au cours des derniers mois avec chaleur humaine et constance, ainsi que son ami Daniel Picol de Moëlan sur Mer, toujours présent à l'appel, le docteur Patrick Vandevyvère d'une intégrité à toute épreuve et le cabinet infirmier des abeilles, à Pont Aven dont les conseils et l'assistance me furent précieux au cours des dernières années.
Jean Jacques Le Goarnig a maintenant quitté son domicile de Pont Aven pour reposer au funérarium de Riec sur Belon, jusqu'à la cérémonie religieuse qui sera célébrée le vendredi 10 mai 2013,à 10 heures, à l'église de Pont Aven.
Auteure : Nolwenn Le Gac