En adhérant au réseau Breizh 5/5, la ville de Guérande affiche une nouvelle fois sa cohésion. Gwenn rann : c’est bien sûr la parcelle ou portion du pays blanc. C’est une terre depuis 1000 ans pour le moins bretonne et qui a joué un rôle historique majeur, que ce soit dans le commerce du sel ou au plan politique (le traité de 1365 qui met fin à la guerre de ligue). Résidence d’Anne de Bretagne qui fuyait la peste qui sévissait à Nantes, le blason historique et herminé de la ville a donné lieu à un logo qui ne fut pas ici détourné. Il a simplement repris les codes bretons. De même, c’est sur le fond une ville qui n’a jamais joué avec l’excès de modernité, a refusé de justesse mais clairement l’artificialisation du marais salant par des projets immobiliers. La Bretagne pour elle, c’est une affirmation et une continuité. Placée de force dans une Région dite des Pays de la Loire, elle promeut dès 2002 l’appellation touristique « Bretagne Plein Sud » et refuse la promotion des marchands de savonnette ligérienne qui voulaient la banaliser. Guérande, la cohérence toujours. La fierté de la Bretagne et d’une identité. Non pour elle-même mais pour écrire une histoire politique en lien avec les gens, en lien avec l’économie et les activités.
Dès les années 1980, elle est pionnière pour des productions salines de qualité, négocie avant les autres le virage écologique en tentant de combiner l’occupation naturelle et les biens économiques. Le directeur des Salines de Guérande, Alain Esnault, est Président de « Produit en Bretagne » en 2006. L’appartenance de la coopérative des paludiers à ce réseau aide aujourd’hui à commercialiser 10 000 tonnes par an pour un chiffre d’affaires de 16 millions d’Euros. En raison de la pression touristique et immobilière, le défi de maintenir une activité dite traditionnelle était loin d’être simple. Or, la stratégie des équipes municipales a toujours été de prendre en compte le passé pour le moderniser, le fructifier. Au lieu de suivre les théories modernistes de l’époque et d’ébrécher sa fabuleuse enceinte, la municipalité avait fait dès 1853 le choix de la conserver. Retenant le temps long de son histoire, on constate aussi qu’elle a davantage fait le choix de la qualité de vie que de s’orienter vers de seules logiques démographiques ou de chiffres. Enfin, en lien avec la pression touristique qui s’exerce sur la côte sud Bretagne, ce fut « oui » pour le tourisme. Mais pour un tourisme négocié et non -comme ailleurs- un tourisme hors-sol voire bâti sur une identité usurpée et parfois, au final, détruite.
Aujourd’hui, la ville compte près de 16 000 habitants et a seulement 13,7 % de résidences secondaires. Elle appartient à une communauté de communes qui communique aussi sur l’appellation « Bretagne plein sud » et l’on observe un travail concret des offices pour un tourisme de tuilage et rentable, non de prédation. Un lien avec le patrimoine, les entreprises, la vente des produits dérivés (les paludiers et sauniers, les commerçants et artisans), l’attachement à la langue, la cohérence des décisions. La ligne directrice d’un chemin breton fait que cette ville a toujours refusé la carte des Pays de la Loire. Avec courage puisque l’on sait que les financements sont moins commodes. Ainsi de ce « Festival du Livre en Bretagne » qui porte la carte de la sincérité, de l’authenticité. Toujours présent. Contre vents et marées.
Aujourd’hui membre du réseau Breizh 5/5, Guérande en devient un fleuron. C’est un symbole de cette Bretagne Sud qui refuse de se faire appeler Pays de la Loire. C’est un symbole d’une cohérence entre la parole politique et la vie des habitants, l’expression d’une conscience d’être de quelque part et d’avoir une identité. Cette stratégie va sans aucun doute faire des émules à l’heure où le rapport des gens aux lieux devient une clé centrale pour le développement. Mariant l’esprit du passé avec la modernité, Guérande est une ville qui cherche moins à grossir qu’à être le représentant d’un territoire qu’elle occupe, d’un territoire compris et appréhendé. Ce dernier est culturellement, naturellement, historiquement, collectivement breton. Félicitations donc à ces élus qui, par leurs actions, font beaucoup et affichent très clairement l’importance de la Bretagne, de ce mot qui là-bas aussi rend plus fort et rassemble.
Jean Ollivro, Bretagne Prospective