La Saint-Patrick à Paris-Bercy succède, les 16 et 17 mars, aux Nuits Celtiques du Stade de France. A Nantes, Celtica fait de nouveau le plein les 11 et 12 juin au stade de la Beaujoire. Dès 2006, Lyon devrait accueillir un grand spectacle de musiques celtiques. Et encore, et toujours, Lorient. Le Festival Interceltique est sur tous les fronts.
« On a lancé la Saint-Patrick d’un pub aux Halles, en 1993. Il y avait tellement de monde que je suis monté sur la table », se souvient Jean-Pierre Pichard, directeur du Festival Interceltique de Lorient (FIL). Désireux d’attirer l’attention des médias sur la réappropriation de la musique celtique, il imagine alors de célébrer à Paris le saint patron des Irlandais. En douze ans, la Saint-Patrick a tour à tour investi le forum des Halles, Beaubourg, le Cirque d’Hiver, la Villette, le Zénith, Bercy et le Stade de France. De 2002 et 2004, les Nuits Celtiques ont attiré, à Saint-Denis, un total de 200000 spectateurs. « Lorsqu’on a rempli quatre fois le Stade de France, on n’a plus rien à prouver », assène Jean-Pierre Pichard.
Retrouvailles avec Bercy
Les 16 et 17 mars prochains, l’ovale du Palais omnisports de Bercy qui peut contenir jusqu’à 15000 spectateurs par soir accueillera deux concerts qui promettent d’entraîner le public dans un voyage musical et celtique. L’affiche est belle : Gilles Servat chantera des incontournables, comme « Le pays », et des morceaux de son nouvel album dans les bacs le 19 mai ; Denez Prigent délaissera l’électronique pour l’acoustique, aux côtés notamment de Louise Ébrel, petite-fille d’Eugénie Goadec « sa grand-mère du kan ha diskan » comme il le dit si bien ; la Galicienne Susana Seivane, véritable virtuose de la gaïta, sera de la fête pour la deuxième année consécutive tout comme Didier Squiban ; enfin, la voix de Nolwenn Korbell devrait en séduire plus d’un. L’interprète de « N’eo ket echu » est ravie de pouvoir « faire entendre sa langue (bretonne) à Paris ». 150 musiciens, danseurs et choristes irlandais, écossais, gallois et bretons rythmeront les trois heures de spectacle aux côtés des quarante sonneurs des bagadoù de Lorient, Auray, Pontivy et Locoal-Mendon ainsi que des danseurs des cercles d’Auray, Pont-l’Abbé, Saint-Evarzec et Pontivy. Les 6000 places debout permettront à une partie du public d’entrer dans la danse et de faire monter l’ambiance alimentée par les jeux de lumière et les images géantes diffusées sur les écrans. De quoi donner « une ferveur et une chaleur qui n’existaient pas au Stade de France », explique Olivier Sévère [1], directeur du développement d’Interceltique 3C (I3C), filiale du FIL en charge des activités de spectacles, concerts et opérations de conseil.
Celtica à Nantes : le retour
Pourquoi ces infidélités du Festival Interceltique de Lorient et d’I3C au Stade de France ? Le changement de lieu en 2005 s’explique de la volonté du Stade de France d’imposer la signature d’un contrat sur trois ans avec une clause d’abandon du spectacle de Celtica à Nantes. I3C ne pouvait accepter cette exigence. Avec cette pause, n’y gagne-t-elle pas au change ? En misant sur le Palais omnisports de Bercy, l’équipe de Jean-Pierre Pichard dispose d’une salle couverte qui prémunit des intempéries, et réalise également une bonne opération financière. I3C voit ses coûts passer de 1,5 millions à 85000 euros et les recettes - hors location de salle - tomber dans son escarcelle. Sont attendus dans l’arène de Bercy 30000 spectateurs, pour l’essentiel des Bretons de Paris les concerts ayant lieu en semaine. Ce chiffre reste loin des 80000 spectateurs qui devraient garnir les tribunes de la Beaujoire à Nantes les 10 et 11 juin prochains. Six mois avant le jour J, 30000 places étaient déjà parties comme des petits pains. L’engouement des Nantais ne se dément pas depuis le succès l’an passé de la première édition de Celtica. Point de Tri Yann en 2005, mais d’autres valeurs sûres sont annoncées dans la cité des Ducs de Bretagne comme Alan Stivell, Denez Prigent, Didier Squiban ou l’Acadienne Dominique Dupuis qui a conquis le cœur des publics nantais et lorientais. Le show celtique, qui s’inscrit dans la tradition des Nuits magiques de Lorient, fera la part belle au chœur gallois, au pipe-band écossais, aux meilleurs bagadoù de Bretagne, dont celui de Saint-Nazaire, et à plus de 400 sonneurs et danseurs.
Objectif 2006 : Lyon avant une tournée
Grand artisan du retour en force des cultures celtiques sur les scènes du monde, Jean-Pierre Pichard entend désormais lancer un nouveau style de spectacle conçu pour des salles de 6000 places. « Le prochain grand concert sera monté à Lyon en 2006 », a-t-il annoncé fin janvier. Probablement à la Halle Tony Garnier. L’événement dans la capitale des Gones devrait marquer le lancement d’une tournée dans d’autres villes de l’hexagone voire d’Europe. « I3C a vocation à exporter son savoir-faire », explique Jean-Pierre Pichard qui fêtera ses soixante ans dans quelques mois. Toutefois, l’heure de la retraite n’a pas encore sonné ; bien au contraire, il se fixe de nouveaux défis, comme cette tournée, même s’il a décidé de passer le flambeau de la direction du Festival Interceltique de Lorient. Placée sous le signe de l’Irlande, la trente-cinquième édition qui aura lieu du 5 au 14 août 2005 sera l’un des touts derniers festivals orchestrés par le « JPP de l’Interceltique ».
RONAN LE FLÉCHER