En plus d’une autosatisfaction à peine nuancée sur sa gestion de crise, il est clair désormais que la sortie de crise constituera juste une « nouvelle étape » ! De prime abord attrayante, la présentation du « monde d’après » par Emmanuel Macron se révèle en effet être une série de tartufferies.
Car pour Emmanuel Macron, le « plan d’investissement pour redresser l’économie du continent », se résume à un pilotage par un couple d’États, la France et l’Allemagne, dont la France souhaiterait le leadership. Ce rôle de « guide » prôné pour la France fragilise, plus qu’il ne consolide, le projet européen. Cette vision est contraire à l’esprit de concorde qui doit prévaloir dans la gestion d’une Europe qui se compose, n’en déplaise à Emmanuel Macron et Angela Merckel, de 27 membres tous égaux et d’une multitude de territoires variés.
Car pour Emmanuel Macron, les 500 Milliards d’Euros mobilisés pour la sortie de crise (qui sont d’ailleurs en grande partie des garanties bancaires et non de l’investissement) ne seront financés ni par la dette ni par l’impôt mais par la casse des acquis sociaux puisque « la seule réponse est […] de travailler davantage », dixit Emmanuel Macron.
Car pour Emmanuel Macron, si « tout ne peut pas être décidé depuis Paris », dans les faits toutes les mesures prises depuis son élection en 2017 s’inscrivent dans un processus de recentralisation. Même la crise du COVID a été gérée de façon centralisée depuis Paris et le Palais de l’Élysée. Le message d’Emmanuel Macron d’hier soir est sans équivoque : il n’y aura pas de nouvel acte de décentralisation au cours des deux prochaines années. Et encore moins de régionalisation. Car dans le « monde d’après », seuls les maires sont cités explicitement dans le projet. Cependant, après la suppression de la taxe d’habitation et le transfert d’un grand nombre des compétences des communes vers l’intercommunalité et les métropoles en particulier, que peuvent vraiment attendre les maires d’Emmanuel Macron ? Il n’y a guère que les hôpitaux et les universités qui devraient gagner « des libertés et des responsabilité». Mais derrière ce dessein d’autonomie de fonctionnement, c’est la privatisation qui se prépare.
Car pour Emmanuel Macron, dans un discours aux relents très cocardiers, le ciment de la France doit être le « patriotisme». Et seuls l’ «ordre républicain » et l’ «unité autour de la République » garantissent de « vivre mieux ». Pourtant, tout en excluant le communautarisme, c’est refuser de regarder la réalité en face.
C’est oublier que c’est au nom du dogme Républicain que la France a confondu unité et uniformité et s’est inventé une mission universaliste et civilisatrice. Que le français a été imposé comme langue unique après une politique linguicide à l’égard des langues dites « régionales ». C’est oublier aussi que c’est au nom d’une prétendue mission émancipatrice que la France a justifié sa politique coloniale dont elle n’est pas encore sortie complètement. C’est oublier que la cohésion sociale ne se fait pas à coup de grands principes, fussent-ils républicains.
Une tartufferie sur les intentions écologistes.
Car pour Emmanuel Macron la relance économique ne peut passer que par des politiques productivistes. Or, le « produire davantage » qu’il appelle de ses vœux est antinomique avec l’indispensable transition écologique.
Au final, ce que propose Emmanuel Macron pour le « monde d’après » c’est exactement de perpétuer le « monde d’avant » alors même que de nombreuses lacunes institutionnelles, démocratiques, économiques et sociales ont été révélées pendant la crise du COVID. Le repli national et le libéralisme ne sont pas la solution. Ils sont le problème. Seule une rupture avec l’ancien monde permettra une sortie durable de la crise. C’est le vœu que formule Régions et Peuples Solidaires.
Gustave Alirol, président de Régions et Peuples Solidaires