A la veille de l'ouverture de la campagne des régionales et au moment où va s'ouvrir le débat public sur les retraites, prélude à une nouvelle réforme du système, il semble urgent, sur le plan de l'égalité de traitement des citoyens, que le président de la République prenne publiquement une position tranchée quant à la fin du privilège, qui n'a que trop duré, des « élus-fonctionnaires ».
Lettre à Monsieur Nicolas SARKOZY
Président de la République
Monsieur Le Président,
Au moment où la France se trouve face à une situation économique très précaire, où l'on assiste à une dégradation amplifiée des finances publiques, où des problèmes urgents sont à traiter, a été lancé de manière incongrue, regrettable, le débat sur l'identité nationale. Or dans le domaine des symboles de la République, il en est un qui, plus que les autres, est trop souvent mis à mal par ceux qui devraient en être les garants. C'est celui de « l' Égalité.» En effet, le risque est grand de voir, une nouvelle fois, ce symbole grandement fragilisé par les mesures et réformes que le gouvernement va être amené à prendre sur le plan social. Cela malheureusement au détriment des plus démunis. Ce qui est difficilement acceptable et je le pense, que vous ne pouvez accepter.
En terme d'égalité, il est une catégorie de citoyens dont on ne remet jamais en cause le statut et encore moins les privilèges. Ou alors seulement « comme effet d'annonce médiatique » au regard d'une spécificité française dont notre pays ne peut pourtant pas n'enorgueillir. Elle concerne pourtant une grande partie de nos parlementaires.
Les concernant, je me permets de rappeler l'article signé par Guillaume Perrault dans Le Figaro du 20 novembre 2007, sous le titre «Élu ou fonctionnaire : pourquoi l'UMP veut obliger à choisir » dans lequel il était indiqué : « Dans son programme législatif, le parti de Nicolas Sarkozy se propose d'instituer une règle simple : « les fonctionnaires devront démissionner de leurs fonctions lorsqu'ils choisissent d'exercer des responsabilités politiques ». « Plus la responsabilité exercée sera importante, plus la démission devra être rapide. En clair, un inspecteur des finances élu député devrait aussitôt démissionner, tandis qu'un professeur d'histoire-géographie de lycée élu conseiller régional pourrait accomplir un mandat avant de devoir démissionner de la fonction publique s'il est réélu ».
Proposition avec laquelle je ne peux qu'être en accord. J'ai en effet – lors de la session du 30 juin 1997 du Conseil régional de Bretagne, dans un souci de simple équité, lors d'une non-réélection – proposé un vœu allant dans ce sens. Il fut rejeté par la commission permanente de cette institution présidée alors par Monsieur Yvon Bourges, de la majorité présidentielle, et dans laquelle siégeaient des élus du parti socialiste.
Outre que cette remise en ordre serait de nature à mettre fin à la « sur-représentation des fonctionnaires dans les instances politiques » (l'actuelle Assemblée nationale compte 240 fonctionnaires sur 577 députés, soit 41 %. Le Sénat, quant à lui, en compte 158 sur 343 sénateurs soit plus de 46 %, dont plus de 60 % appartiennent à l'Éducation nationale).
Il est un autre aspect qui devrait retenir toute votre attention car cela justifie la nécessaire réforme.
Il n'est pas en effet admissible que, durant la durée de leur carrière politique l'ancienneté des fonctionnaires continue à progresser dans leur corps d'origine et leurs droits à la retraite soient préservés. Il n'est pas plus tolérable de savoir qu'ils peuvent réintégrer du jour au lendemain leur corps d'origine en cas d'échec aux élections.
On ne peut, de plus, en terme d'équité, qu'être choqué lorsque l'on sait que les pensions de retraite des fonctionnaires ne sont pas provisionnées dans les comptes de l'État et sont payées chaque année sur le budget de fonctionnement de celui-ci au même titre que les rémunérations des fonctionnaires en activité. Donc en grande partie par l'ensemble des contribuables qui subissent, en fait, « une double peine. »
A la veille de l'ouverture de la campagne des régionales et au moment où va s'ouvrir le débat public sur les retraites, prélude à une nouvelle réforme du système, il semble urgent, sur le plan de l'égalité de traitement des citoyens, que vous preniez publiquement une position tranchée quant à la fin d'un privilège qui n'a que trop duré et que la réforme, qui est attendue par tous les citoyens, soit menée dans les plus brefs délais. La suggestion faite au gouvernement de prendre l'initiative d'un projet de loi dans ce sens serait un geste fort de votre part.
Comme tous les Français, je sais que la partie ne sera pas facile car une nouvelle fois les parlementaires concernés seront « juges et parties ». Mais comme il y va de l'intérêt général et de la solidarité nationale il peut être fait appel à leur sens du respect des valeurs de la République.
Je reste à votre entière disposition.
Je vous assure, Monsieur le Président, de l'expression de ma considération.