Éditorial du n° 108 de décembre 2016 de Dihunomp !, écrit avant le deuxième tour des Primaires de la Droite et du Centre, où François Fillon a été choisi comme candidat.
En France, les partis politiques, dont l’objectif primordial est, en principe, la conquête des pouvoirs que s’est appropriés l’État au fil d’une longue Histoire dite de France, semblent avoir quelques difficultés à trouver dans leurs propres rangs, un homme ou une femme capable de les représenter pour assumer et diriger les fonctions accaparées.
Ils font donc, pour les aider dans cette difficile sélection, appel dans un premier temps au peuple - croyant ainsi faire preuve d’un bel esprit démocratique - pour désigner le meilleur d’entre eux, en vue de prochaines élections appelées “présidentielles”.
On désigne cette consultation du peuple sous le nom de “primaires”, sous entendant “électorales”. Comme cela se produit tous les cinq ans et demande une certaine organisation à l’abri de tous soupçons d’irrégularité, et qu’en outre, il faut laisser au peuple un certain temps pour réfléchir, on prépare ce petit “spectacle” - selon l’expression de Jean-Yves Le Gallou reproduite dans notre édition n°107 - très longtemps à l’avance, pratiquement dès la mise en place du nouveau gouvernement résultant de l’élection précédente. Le spectacle est ainsi permanent.
Mais ceci est loin d’être le côté le plus hilarant de la comédie.
Afin de “préparer” le peuple à faire le “bon” choix, on lui présente un certain nombre de postulants possibles et c’est là que commence le vaudeville. Certains de ces postulants sont connus, d’autres moins. Le jeu consiste donc dans un premier temps à essayer de les mettre à égalité sur le plan de la notoriété. C’est le monde journalistique qui s’en charge au moyen de portraits, interviews, anecdotes, conférences et confrontations diverses et l’on peut dire que, sur le plan de l’objectivité, le monde médiatique ne se classe pas dans le “top” de l’excellence.
Il en résulte un premier classement populaire qui dépend davantage des choix journalistiques, tant dans la manière dont sont posées les questions que dans leur choix.
Certains sujets sont soigneusement laissés de côté (économie, déficit budgétaire et finances publiques, infrastructures à l’abandon, projets d’avenir cohérents, libertés d’agir et d’entreprendre pour la société qualifiée de civile, diplomatie à l’international et autres relations commerciales avec le monde, avenir de l’Europe, etc.) tandis que d’autres, notamment d’aspect social, prennent le dessus (emploi, chômage, sécurité, fonctionnaires, rôle primordial de l’État, subventions et aides de toute nature, etc.).
Bien entendu, tout cela sur fond du fameux et indéracinable clivage gauche/droite, ou bien encore d’étiquettes à l’emporte-pièce du genre progressiste, radical, ultra quelque-chose, conservateur, qui ne veulent strictement rien dire mais portent automatiquement leur message de désaveu.
Et par-dessus toute cette mascarade, interviennent des instituts dits “de sondage” qui essaient tout au long de la consultation d’en faire chaque jour le point pour en informer une population que l’on estime palpitante d’intérêt.
Et c’est là le moment le plus comique du scenario comme on vient d’y assister en fin de ce mois de novembre lors du résultat du “premier” tour des “primaires” (car il y a un deuxième tour) “de la droite et du centre” (ne jamais oublier de dire “et du centre”).
ll s’agit, pour ceux qui auraient “loupé” un acte ou une séquence, de trouver celui ou celle qui mettra un point final au quinquennat présidentiel du moment.
Tous à l’unisson, ces merveilleux et infaillibles oracles (pléonasme) dénommés “instituts de sondage” avaient prédit une arrivée au coude à coude de deux des postulants, distançant de très loin le troisième postulant. Et “que croyez-vous qu’il arriva, aurait demandé ce cher Voltaire” ? Ce fut le troisième qui gagna avec une très nette avance sur les deux suivants, toujours presque au coude à coude.
Et l’on va assister maintenant, au moment où j’écris cet éditorial, à un deuxième round pour désigner le vainqueur final entre le gagnant du premier tour et son premier suivant.
Une occasion de recommencer les mêmes gesticulations journalistiques sur la base des mêmes prises de position au préalable par les mêmes journalistes avec en plus quelques petites phrases sarcastiques pêchées ici ou là dans les écrits ou les palabres de chacun des deux “gagnants”.
À se demander si le gagnant final aura encore quelques chances de pouvoir diriger sagement et sereinement les affaires !
Mais après tout, c’est son affaire !
Paul Cherel
- (voir le site) de IDBE : la Bibliothèque Numérique Bretonne et Européenne, page Paul Chérel, avec sa biographie et les numéros de Dihunomp de 2012 à 2015 à télécharger.