Tandis que certaines provinces françaises comme l'Alsace ou la Bourgogne ont une grande tradition gastronomique, établie parfois depuis des siècles, la Bretagne n'a eu pendant longtemps qu'une réputation très modeste en ce domaine. Certes certains produits comme les huîtres de Cancale ou de la rivière de Belon sont appréciés des gourmets depuis fort longtemps. Dans son "Grand dictionnaire de cuisine", Alexandre Dumas a dit tout le bien qu'il pensait des oignons roses de Roscoff, particulièrement appréciés aussi des ménagères britanniques depuis déjà près de 200 ans. La Bretagne a eu pendant près de 50 ans un quasi-monopole mondial dans le domaine de la conserve alimentaire avec des marques prestigieuses comme Amieux, largement connues au niveau international. L'un des plus grands critiques gastronomiques français du XIXe siècle, le Nantais Charles Monselet, qui porta avant d'autres le titre de "prince des gastronomes", contribua aussi à faire connaître certaines spécialités de la péninsule bretonne.
C'est surtout depuis 50 ans que l'on a assisté à une montée en puissance de la gastronomie bretonne, saluée par l'entrée de restaurants de Bretagne dans les guides comme le Guide Michelin et le Guide Gault et Millau, par la réputation grandissante de nombreux chefs bretons à Paris, à New-York, à Washington, à Montréal, à Tokyo et ailleurs, et aussi par le développement de productions agricoles et agro-alimentaires axées sur la recherche de l'excellence. Des spécialités locales ont pris un essor inattendu et le patrimoine gastronomique de la Bretagne est désormais considéré comme faisant pleinement partie du patrimoine général de la Bretagne.
Un des phénomènes qui a accompagné et illustré cette mise en valeur des richesses de la Bretagne dans ce domaine, a été la création de confréries gastronomiques avec leurs costumes pittoresques et colorées qui contribuent avec panache à la mise en valeur des produits du sol et de la mer ainsi que ceux qui sont nés de l'imagination et du talent de cuisinières et des cuisiniers de la péninsule. Il y en a pour le poulet de Janzé, le coco de Paimpol, l'artichaut de Saint-Pol, les vins du Pays Nantais (chevaliers Bretvins), etc. Beaucoup de ces confréries sont de tradition récente, mais elles se sont vite inscrites dans le paysage breton au point qu'on pourrait volontiers les croire issues du temps de la splendeur ducale.
Le hasard fait parfois bien les choses : deux livres qui leur sont consacrés viennent de paraître à quelques semaines d'intervalle.
Les éditions Ouest-France ont fait paraître le 22 janvier un livre de 144 pages (vendu au prix de 15,90 €) intitulé "Confréries gastronomiques de Bretagne" qui a pour auteur Alain-François Lesacher, les photographies étant de Benard Enjolras. Historien de formation, principal de collège, conseiller général d'Ille-et-Vilaine et très actif secrétaire de l'Association des écrivains de l'ouest, à Rennes, Alain-François Lesacher est déjà l'auteur de très nombreux livres, dont beaucoup publiés aux éditions Ouest-France. C'est aussi un gastronome averti qui fut l'un des fondateurs de l'Ordre de la frigousse, un savoureux plat traditionnel de Haute Bretagne.
Quelques semaines plus tard, les éditions Coop Breizh, de Spézet, ont publié "Confréries de Bretagne", élégant ouvrage cartonné de 144 pages (vendu au prix de 20 €) dû à Bleuzen du Pontavice (dont c'est le 20e livre publié) avec des photos de Hervé Renné. Bleuzen du Pontavice dont tous les amis connaissent les fabuleux talents de cuisinière (la seule évocation de son kig-ha-fars met l'eau à la bouche), est bien connue pour ses nombreux livres dans le domaine de la gastronomie. On découvre sous sa plume les 26 confréries de Bretagne, les produits dont elles se sont faites les ambassadrices ainsi que bien des recettes alléchantes à découvrir et à mettre en œuvre.
Bien que traitant du même sujet, ces deux livres, tous deux illustrés de superbes photographies, sont assez différents et dans le fond très complémentaires. Ils méritent de figurer l'un à côté de l'autre dans tous les foyers