Annie Menvielle, syndicaliste CGT-FO, faisait partie des centaines de syndicalistes bretons partis à Paris rejoindre leurs camarades. Elle nous livre ici son témoignage.
ABP : Annie, tu étais hier à Paris pour la grande manifestation. Tu as été consternée par le traitement que les médias en ont fait, oubliant la grande mobilisation des syndicats, vite remplacée par les dégradations. Peux-tu nous raconter ce qui s'est passé ?
AM : Effectivement, quand on a fait sept heures de car, voir déferler des centaines de milliers de personnes avec des drapeaux des différents syndicaux et qui disent par des slogans fermes leur détermination à voir le retrait d'une loi qu'ils jugent tous néfastes pour l'avenir de la population, cela ne peut que rendre enthousiaste. Et alors que nous avons marché pendant cinq heures, il y a eu, apparemment avant même que la manifestation démarre, de nombreuses violences qui paraissent venir de groupes qui n'ont rien à voir avec les syndicalistes venus de toute la France. Mais surtout, apprendre ce matin que l'Hôpital Necker a été détruit alors que lorsque nous sommes remontés chercher notre car, à 19h, il n'y avait que deux TAG sur les vitres mais rien de brisé, on se dit que ces violences n'ont rien à voir avec l'expression populaire qu'était la voix de ces centaines de milliers de salariés déterminés à défendre ce que leurs ainés ont construit. Mais pourquoi ne voit-on pas ces images-là, des drapeaux CGT, FO SUD, FSU flotter en semble dans l'unité d'un mot d'ordre : RETRAIT...
ABP : Comment une démocratie comme la France peut-elle à ce point ignorer son histoire et ignorer les revendications des syndicats et des jeunes rassemblés en nombre ?
AM : C'est justement parce qu'elle n'ignore pas l'histoire qu'elle sait que les acquis de 36, consolidation du Code du travail, congés payés, transformation de la caisse des mineurs en solidarité sociale sont le résultat de la force de la grève générale qui s'est construite dans les actions de rue comme celle d'hier que ce gouvernement reste sourd aux voix du peuple. C'est parce qu'il ne veut pas prendre d'autre choix que de se soumettre aux injonctions du FMI, de la Banque Centrale Européenne, des traités européens eux-même, que ce gouvernement cherche à dévoyer le rôle des syndicalistes dans l'expression populaire et ne cesse depuis le 9 Mars de mettre en avant les violences pour faire passer les salariés pour des "voyous"!
ABP : Comment vont se passer les jours à venir ? La mobilisation des syndicats ? Quelles sont les issues possibles ?
AM : Pour ma part, en avec d'autres syndicalistes, depuis plusieurs années nous organisons des conférences nationales pour la recherche de l'unité pour gagner sur les revendications. La dernière a rassemblé 1 800 militants ce 4 Juin à Charenton. Depuis le 9 Mars, nous disons que, partout, dans les usines, les entreprises, les services, il faut discuter des conséquences de cette loi, qui entraîne les salariés vers une position de soumission totale aux employeurs, avec une flexibilité sans nom et des baisses de salaires énormes exigées par le grand patronat. De cette conscience naîtra la force de l'organisation générale de la mobilisation, pour en découdre avec ceux qui ne veulent pas enlever leurs bouchons d'oreilles ! ceux qui n'ont pas voulu entendre le million qui s'est déplacé sur Paris et toutes les centaines de milliers d'autres restés en province. Un compte-rendu de la conférence du 4 Juin a lieu demain jeudi 16 à 16h30 au local FO de Quimperlé, place des écoles et discutera de la plate-forme proposée.