Pontivy le 1er février 2012
Monsieur le président du Conseil Général du Morbihan
Nous venons de prendre connaissance de l’atlas des paysages du Morbihan élaboré à votre demande ainsi qu’à celle du conseil Régional ; les réalisateurs étant la DREAL (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement en Bretagne), la DDTM (Direction départementale des territoires et de la mer du Morbihan) et le CAUE (Conseils d’Architecture, d’urbanisme et d’Environnement) du Morbihan
Une tâche noble d’analyse et de description de nos paysages dont nous aurions aimé vous remercier.
Hélas, sous couvert d’atlas, nous découvrons un outil se pliant très habilement aux projets industriels en cours et principalement aux centrales éoliennes fort embarrassantes.
En tout cas, nous notons que les auteurs de cet atlas disent implicitement, à plusieurs reprises, que les centrales éoliennes nuisent au paysage. Enfin !
Ce serait donc en vain qu’on a tenté de décrire les aérogénérateurs comme « un envol d’oiseaux migrateurs » (page 124 du dossier de ZDE de Pontivy : parc de Noyal/Gueltas).
Nous n’ignorons pas que cet atlas sera un outil important d’aide à la décision pour la commission des sites notamment.
En effet, l’un des volets de cet atlas s’intitule « Enjeux des centrales éoliennes et photovoltaïques » et le sous-titre annonce : « des potentialités à encadrer et à envisager à une échelle régionale »
Nous comprenons assez vite que l’auteur de l’atlas sera seul juge de cet « encadrement » afin de satisfaire les demandes des divers porteurs de projets industriels, et qu’il prétend détenir une compétence régionale !
Aussi nous indignons-nous : quelle légitimité ont les auteurs de cet atlas pour porter des jugements de valeur et faire des choix d’implantations de centrales éoliennes et photovoltaïques ?
Cette tâche incombait aux instances de concertation du schéma régional éolien. Or nous savons que ces travaux n’ont pas abouti.
Lors des réunions de concertation à Rennes, nous avons entendu dire, à plusieurs reprises, qu’il fallait s’interdire la sacralisation de certains sites. Et nous avons eu sous les yeux une cartographie des unités paysagères présentant des différences notables par rapport à l’atlas du Morbihan.
Or nous découvrons qu’un auteur de l’atlas du Morbihan écrit par exemple : « Il parait logique de ne pas voir des éoliennes dans des paysages qui font la renommée d’une région, à l’image établie, comme les paysages du Golfe. »
Subjectivité arrogante. Quels sont les critères de cette logique ?
Il poursuit : « Les zones favorables se concentrent principalement dans le plateau de Pontivy-Loudéac, et dans les plaines littorales. Ces zones favorables correspondent à des paysages aux composantes naturelles et bâties plutôt dispersées, aux reliefs peu prononcés, des territoires peu connus en tant que paysages et peu touristiques, et dont l’économie est orientée vers la production industrielle et agro–alimentaire. »
C’est méconnaître la Convention Européenne du Paysage devenu loi française en 2006 qui dit en préambule : « le paysage est partout un élément important de la qualité de vie des populations : dans les milieux urbains et dans les campagnes, dans les territoires dégradés comme dans ceux de grande qualité, dans les espaces remarquables comme dans ceux du quotidien »
Nous aurions pu tout aussi bien écrire : « les implantations de centrales éoliennes et photovoltaïques ne sont pas envisageables dans le Morbihan intérieur afin de ne pas renchérir sur les dégâts des décennies passées. Ces territoires entreprennent une restauration du bocage qui va permettre le renouveau culturel et touristique. Il ne convient pas de le compromettre »
De quel droit un urbaniste décide-t-il de l’avenir de notre territoire ?
Notre plateau serait en quelque sorte dépourvu de … « paysages » ce qui présente très opportunément une faculté rare : « la faculté d’accueillir de nombreuses évolutions possibles, sans craindre de perdre leur identité. »
Autant dire que le plateau de Pontivy/Loudéac va être sacrifié.
Inacceptable.
Le conseil d’administration de notre association réuni le lundi 30 janvier 2012 à Noyal-Pontivy a décidé à l’unanimité de dénoncer cet atlas élaboré sans concertation et au mépris de la population rurale du plateau de Pontivy/Loudéac.
De plus, nous savons que c’est là défendre une production d’énergie largement dépassée à l’heure actuelle et ne servant qu’à enchérir le coût de l’électricité.
Nous observons que les pays initiateurs de ce marché sont en train de revoir leur position allant pour certains d’entre eux jusqu’à l’abandon de toute subvention à l’éolien en raison du manque de rentabilité et d’objectifs. (L’Allemagne, l’Espagne, et le Danemark)
Nous ne comprenons pas l’aveuglement de nos élus qui s’agrippent ainsi à leur totem idéologique au mépris des nuisances causées à la population et à la dégradation des paysages de manière irréversible pour l’avenir.
Nous tenons à citer Frédéric Mitterrand, ministre de la culture, qui dans son discours du 15 décembre dernier aux préfets de régions déclarait :
"Dernier enjeu, d'importance, dans les mois et les années à venir : celui de la préservation de nos paysages. Je sillonne très régulièrement et fréquemment la France. Je suis souvent très inquiet de voir à quel point notre cadre de vie se dégrade, que ce soit par le biais de champs d'éoliennes anarchiques, visibles à des kilomètres à la ronde (alors que beaucoup de schémas départementaux cohérents avaient été établis avec les Services territoriaux d’architecture et du patrimoine), ou par des abords de ville dénaturés et bardés d'enseignes et de constructions sans ambition esthétique »
Le ministre aurait même pu dire « à plus de 30 kilomètres à la ronde » car ce sont bien ces distances qui ont été retenues pour le rejet des projets éoliens proches du Mont Saint Michel.
Que dire enfin des erreurs et omissions des bureaux d’études basés il est vrai à Paris et à Rennes et qui n’ont sans doute travaillé que sur des données bibliographiques.
En exemple nous prendrons les Montagnes Noires ; nous lisons : « c’est là que se trouve le point culminant du Morbihan : 299 m au nord de Gourin, à la limite du Finistère. » C’était là en effet, c’était le Rocher de la Madeleine. Mais nous savons tous qu’il est passé depuis longtemps dans les concasseurs de l’exploitant de la carrière !
Quant au point culminant actuel, la calotte Saint Joseph située à Langonnet à 297 m, elle n’apparaît même pas sur cet atlas, pas plus que la commune.
Aussi, notre association, choquée par cette initiative antidémocratique, a décidé de vous adresser cette lettre ouverte ainsi qu’à Mr le préfet de Région, à Mr le préfet du Morbihan, à Mr le sous-préfet de Pontivy et aux maires des communes du plateau de Pontivy/Loudéac afin de dénoncer cet atlas.
Nous demandons que l'Atlas des paysages du Morbihan soit revu par des géographes compétents avec le concours des associations en dehors de tout objectif autre que celui de la connaissance des paysages.
pour l'APB la présidente Anne Marie Robic
Copies à : Mr Le préfet de Région, Mr Le Président du Conseil Régional, Mr le préfet du Morbihan, Mr Le sous-préfet de Pontivy, Mesdames et Messieurs les maires des communes du plateau de Pontivy/Loudéac, à la presse
aux lecteurs: lisez-nous bien, notre sujet c'est la hiérachie des paysages telle qu'elle apparait dans l'atlas du Morbihan. Or, en lisant certaines réactions, nous sentons surgir une colère hors de propos.