Le gouvernement Hollande-Ayrault ne fait pas que des conneries. Vu l'urgence sans cesse différée du sujet, ils ont lancé en 2013 une enquête sur "la refondation de la politique d'intégration", enquête dont les résultats ont été rendus publics à la fin de l'année, et qui constituent une heureuse surprise, en particulier ceux du groupe de travail "connaissance-reconnaissance", dont l'esprit pourrait se résumer par son article 4 : Reconnaître les langues et les cultures comme une compétence et un atout de développement. (voir le site)
Bien évidemment, ce rapport lucide et intelligent a fait l'objet d'un tir de barrage d'une violence inouïe dès sa publication. Rien d'étonnant, on est au pays du racisme républicain décomplexé style "Ein Reich, ein Volk…", où l'on peut parler sans vergogne (ni sans sanction) de "borborygmes de patois africains" au sujet de langues véhiculaires davantage parlées que le français et où des chroniqueurs pas très drôles peuvent parler de la Bretagne en ces termes sur la prestigieuse France-Culture : (voir le site)
Pour en savoir plus, lisez l'excellent article de l'historien Jean-Pierre Cavaillé sur Mediapart : (voir le site)
On se reportera également à l'article de Philippe Argouarch dans ABP (voir le site) , qui bizarrement n'a suscité qu'indifférence ou hostilité (deux commentaires).
Peut-être serait-il temps que les Bretons aillent chercher leur inspiration chez les poètes et penseurs de la Caraïbe, comme Patrick Chamoiseau, qui voient la créolisation du monde comme modèle à la fois d'enracinement et d'ouverture : "L’idée du métissage signifie que je n’ai pas à me cantonner dans les seuls éléments de ma culture mais que toutes les richesses des humanités sont à ma portée. Aujourd’hui, l’épanouissement d’un individu ou d’une nation passe par une culture des cultures, une civilisation d’incivilisations. Une civilisation ou une culture, qui essaierait de se construire ou de se maintenir dans des modalités qui seraient des modalités étanches, s’asphyxie…
Je suis indépendantiste martiniquais. Je considère que la décolonisation, dans les années soixante, a fait disparaître l’administration coloniale mais non l’esprit colonial.. C’est encore l’esprit colonial que de penser qu’il faille absolument qu’une république soit une et indivisible… On peut tout à fait envisager une République Française unie, on peut envisager un pacte républicain dans lequel je pourrais m’associer en toute souveraineté. Ce sont des modalités élémentaires et je ne comprends même pas qu’on ait encore besoin de réclamer ces choses-là."(2008)