On le sait la réforme du Président Hollande de refonder les régions avait abouti – sans concertation
aucune, faut-il le rappeler – à mettre en place 13 régions nouvelles. Cette «décision du prince» n’avait
pas fait que des heureux. Si les Normands pouvaient être satisfaits en retrouvant leur unité, d’autres
se trouvaient noyés dans des ensembles purement technocratiques comme on les aime tant à l’ENA.
C’était le cas de l’Alsace où très vite la plupart des élus se sont rebellés face au pouvoir central. Le
gouvernement Macron, qui dans ses débuts avait affirmé vouloir en finir avec la vision jacobine de
l’Etat français, a bien été obligé de tenir compte de la bronca alsacienne. Une déclaration commune
a donc été signée le 29 octobre 2018 entre les deux départements alsaciens, la région Grand-Est et
l’Etat. Tout ceci a abouti à un projet de loi qui regroupera le Haut et le Bas-Rhin dans une Collectivité
Européenne d’Alsace laquelle disposera de compétences suplémentaires bien spécifiques et une
dotation augmentée de l’Etat.
Qu’on en juge. Cette CEA sera dorénavant compétente dans 6 domaines :
• la responsabilité de la coopération transfrontalière avec la Suisse et l’Allemagne ;
• la maitrise de la politique de bilinguisme ;
• le pouvoir de recruter du personnel enseignant ;
• la gestion de la promotion économique de son territoire ;
• la gestion de la politique touristique et du label «Alsace» ;
• le transfert de la gestion de l’autoroute A5 et des routes nationales avec possibilité de lever des
ressources.
Les élus alsaciens ne cachent pas que leur ambition première était et reste la constitution d’une Col-
lectivité à statut particulier. Néanmoins en gens pragmatiques, ils considèrent ce texte comme une
première brèche dans le dogme d’ une France uniforme et régie par le dogme jacobin. Evidemment
ce compromis a déclenché la colère des tenants d’une «République une et indivisible», tout parti-
culièrement dans les rangs de la France Insoumise en la personne du député de Seine-Saint Denis,
Bastien Lachaud, pour qui ce projet de loi n’aboutira qu’ à «détruire la République, ses principes et
son organisation». Rien que cela !
Et nos député bretons? On aura noté, les députés Paul Molac (Mor-bihan) et Yannig Kerlogod
(Côtes d’Armor) exceptés, leur totale inertie sur le sujet. On attend toujours de leur part une «union
sacrée» pour bâtir un projet commun répondant aux ambitions, aux possibilités et aux spécificités
de leur terre d’élection. Il faut croire qu’ils se satisfont pleinement d’une Bretagne administrative
amputée de son département le plus puissant (40% de l’économie bretonne) et qui la place en con-
séquence au 10 ème rang des nouvelles régions quant au PIB.À croire qu’une seule ambition les
anime : leur réélection.
Dr. Jean LE MEE,
Président de l’AFB-EKB