La seconde session d'installation du Conseil régional est restée très technique. Dommage que, sur le sujet de la réunification, l'assemblée bretonne ait affiché d'emblée l'image de sa désunion.
La campagne électorale est derrière nous. D'ailleurs, ce 15 avril à Rennes, le président Le Drian a rangé ses attributs de campagne, la chemise noire et la cravate jaune criblée d'hermines. La configuration de l'hémicycle est définitive pour les élus des six groupes politiques : PS et apparentés, PC, Bretagne Écologie, UDB Autonomie et Écologie, Europe Écologie Bretagne, BDZ Bretagne à venir (BDZ comme Breizh da Zont).
Lors de cette seconde séance d'installation, on cale tous les rouages de l'assemblée. Sept commissions (économie, formation, aménagement du territoire, culture et sport, environnement, solidarités, finances) sont formées, de 11 à 13 membres chacune. Une après-midi suffit à passer en revue des sujets techniques mais indispensables à la bonne marche de l'exécutif breton : adoption du règlement intérieur et du règlement budgétaire et financier, indemnités et formation des élus (voir encadré), moyens des groupes, élection des commissions d'appels d'offre et du rapporteur du budget Pierrick Massiot.
L'arrêt de la Cour d'Appel de Paris dans l'affaire de l'Erika, les algues vertes, le plan véhicule vert et la préparation de la réponse bretonne au grand emprunt français nourrissent le discours de Jean-Yves Le Drian sur l'actualité récente. En attendant « la première session utile du mandat » (sic) consacrée à l'agriculture et à l'agroalimentaire sur fond du grand débat européen sur l'avenir de la PAC après 2013, l'intérêt de la plénière tient d'abord aux interventions des différents groupes politiques, à l'aube de cette nouvelle mandature.
Six groupes politiques
L'ancien conseiller général du Finistère Richard Ferrrand porte désormais la voix du groupe socialiste dans l'assemblée régionale. Avec emphase. « Nous ferons prendre à la Bretagne une France d'avance puisque la Bretagne solidaire, créative et responsable que nous construisons, a vocation, par exemple, à inspirer les évolutions que nous voulons pour notre pays. » En écho aux propos de Jean-Yves Le Drian sur « les risques que fait peser, sur le fait régional, la réforme annoncée des collectivités territoriales », le Carhaisien rappelle à ses collègues que « nous siégeons toutes et tous dans une assemblée dont nous ignorons le devenir. »
Sur les bancs de la droite et du centre, Bernadette Malgorn et Jacques Le Guen siègent côte à côte. La première promet « une opposition combative, vigilante et soucieuse de l'intérêt général ». « Chaque euro doit être utile aux Bretons », espère-t-elle. On sourit à l'évocation de l'averissement de l'ancienne Préfète de « ne pas reproduire une forme de jacobinisme à l'échelle régionale ».
« Chapeau l'artiste », lance à l'attention de Jean-Yves Le Drian le villenepiniste Le Guen qui ironise sur « cette élection (qui) dégage l'horizon » : « Une victoire totale, une majorité forgée entièrement à vote main, vous êtes le président de Région aux mains libres que vous avez tant rêvé d'être. » Cette saillie du député ne fait pas rire du tout les élus de l'UDB et d'Europe Écologie Bretagne, exclus de la majorité mais avec lesquels il faudra compter pendant quatre ans. « Nous serons présents sur l'ensemble des dossiers, concrets et pragmatiques », affirme Guy Hascoët, campé dans son rôle de chef de file des listes d'une « écologie structurée et autonome ».
Tergiversations sur la réunification
À l'issue de l'exposé du socialiste Thierry Burlot, est adopté le projet de charte fixant les orientations pour le futur parc naturel régional du Golfe du Morbihan. L'ouverture d'une enquête publique préalable est fixée à juin. Il est bientôt 19 heures lorsque l'UDB et Europe Ecologie Bretagne déposent une motion en faveur de la réunification de la Bretagne. Kristian Guyonvarc'h souligne l'importance de prendre position en début de mandat sur « cette question récurrente ». Son texte propose de réactiver un groupe de travail interne à l'assemblée et d'intégrer le Conseil général de Loire-Atlantique dans l'agence économique de Bretagne ainsi que dans le B15 . C'est avant tout une manière d'« adresser un message clair au législateur en faveur de l'organisation d'une consultation populaire ».
Afin que la région des Pays de la Loire puisse prendre part à un tel scrutin, Éric Berroche, porte-parole des communistes, demande l'amendement du texte. Sinon, les élus PC, composante de la majorité Le Drian, ne prendront pas part au vote de la motion. L'UMP Stéphane de Sallier Dupin ne convainc guère sur les raisons du groupe Bretagne d'avenir-BDZ de s'abstenir. Dans un premier temps, Kristian Guyonvarc'h reste ferme. « Alors, si vous voulez un vote, vous allez l'avoir, mais malheureusement il ne sera pas unanime », prévient Jean-Yves Le Drian.
Personnellement favorable à la motion, mais bien embêté, le président suggère de renvoyer le vote à la prochaine séance plénière. « Sous réserve d'un engagement à ce qu'une délibération soit prise, à l'unanimité ou pas », insiste Kristian Guyonvarc'h qui accepte alors de retirer son texte. « Mieux vaut créer les conditions du consensus avant de faire le vote », se réjouit Jean-Yves Le Drian, parfait dans son rôle d'arbitre sur ce sujet épineux qui sera tranché à l'occasion de la session des 24 et 25 juin.
article paru dans le magazine armor sous la plume de Ronan LE FLÉCHER
Pour s'abonner à armor : (voir le site)