Suite au reniement de François Hollande sur son engagement lors de la campagne présidentielle de faire ratifier la charte européenne des langues régionales, le maire de Carhaix demande dans une lettre ouverte que nous publions ci-dessous, une entrevue avec le Président de la République.
Carhaix, le 20 mars 2013
J'ai eu l'honneur de vous accueillir à Carhaix en juillet 2011 alors que vous étiez candidat à la primaire socialiste. Je vous ai soutenu dès le premier tour, considérant que vous étiez le seul en mesure de battre le président sortant, Nicolas Sarkozy. Vous êtes sorti vainqueur de cette primaire et j'ai ensuite fait campagne, comme des dizaines de milliers de militants des forces de progrès, pour que vous l'emportiez au second tour de cette élection majeure en France. Vous avez obtenu plus de 68 % des suffrages à Carhaix.
Lors de votre venue au festival des Vieilles Charrues, nous avons eu le plaisir de converser, à la même table, avec Jean-Yves Le Drian, Président de la Région Bretagne, Léna Louarn, vice-présidente en charge de la langue bretonne, et des responsables du festival. Nous avons eu l'occasion de rappeler l'importance que revêt pour le peuple breton la ratification de la Charte européenne des langues minoritaires, la réunification de la Bretagne, avec le retour de la Loire Atlantique dans la Bretagne administrative, une véritable régionalisation afin de libérer les énergies et de créer des richesses et donc de l'emploi� et enfin la création d'une télévision bilingue. Ces revendications ont déjà été portées par Jean-Yves Le Drian et pour certaines, adoptées à l'unanimité, sous forme de v½ux, par le Conseil Régional de Bretagne.
Aujourd'hui, dans un climat de crise économique et sociale, où les Bretons s'inquiètent pour leur avenir, où les plans sociaux se multiplient dans le Finistère, où l'agriculture et l'agroalimentaire souffrent � on attend d'un gouvernement de gauche de véritables réformes structurelles. La reconnaissance officielle des langues régionales, par la ratification de la Charte européenne des langues minoritaires, était une de ces réformes très attendues, en Bretagne comme ailleurs. Elle ne coûterait pas un Euro.
Cette revendication était votre 56eme engagement de campagne lors de l'élection présidentielle !
Vous comprendrez l'incompréhension d'une grande partie de votre électorat en Bretagne de constater que ce qui avait été promis et en possibilité d'être fait ne le soit pas alors qu'en même temps un climat anxiogène sur les difficultés de l'emploi et de la diminution du pouvoir d'achat se développe.
J'ai encore été très surpris de constater récemment que le Ministère de la Justice a estimé que les livrets de famille bilingues, français-breton, de la Ville de Carhaix, étaient illégaux alors même que nous revendiquons un statut officiel pour la langue bretonne.
Vous constaterez que ces décisions inquiètent tous les défenseurs de la Bretagne et plus spécifiquement toutes celles et tous ceux qui souhaitent voir perdurer l'identité de la Bretagne. Face à toutes ces difficultés de tous ordres, économiques, culturels, sociaux� d'aucuns considèrent désormais que « c'est la Bretagne qu'on assassine� »
C'est dans ce contexte que je vous demande de bien vouloir me recevoir rapidement à l'Elysée, avec quelques personnalités représentatives de Bretagne, afin que nous puissions vous faire part de notre incompréhension et vous exposer les attentes extrêmement fortes des Bretonnes et des Bretons sur ces questions, mais aussi sur ce climat général difficile au niveau social, économique et culturel qui gagne actuellement notre territoire.
Comptant sur votre réponse rapide, je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, à ma plus haute considération.
Christian TROADEC
Maire de Carhaix
Conseiller général du Finistère »
Philippe Argouarch