Cette précieuse orfèvrerie vient d’être dérobée. A plusieurs titres, nous pouvons-être indignés, que nous accordions grande importance ou pas à l’épopée de la duchesse Anne. Mon propos est juste de souligner ici combien ce qui nous arrive était prévisible et même assez normal au sein de l’ordre français.
Ce genre d’avanie est le lot des cultures minorisées, bafouées ou secondarisées. La protection accordée au reliquaire était de celle que l’on accorde au patrimoine d’intérêt local, au sein d’un ordre hypercentralisé. Une protection de seconde main, en quelque sorte. Pièce unique symbolisant la force du lien avec leur duchesse pour les Bretons, le reliquaire ne présente pas le même intérêt aux yeux de Paris. S’il avait revêtu une importance historique de premier rang pour la France, la protection accordée eût été maximale.
On ne compte plus les éléments de notre patrimoine déliquescent, ces textes précieux pour notre histoire, notre patrimoine ou nos langues, qui dorment dans les fonds poussiéreux des Bibliothèques nationales et qui jamais ne croiseront le regard du chercheur car personne ne s’intéresse à la Bretagne au sein de l’université française. Je pense encore à ces enregistrements en langue bretonne jetés par mégarde ou malveillance par les autorités légalement chargées de leur conservation.
Même nos langues ne sont pas une priorité politique pour le Conseil régional de bretagne, sinon, on le saurait. Il faudrait dix fois plus de jeunes locuteurs en langue bretonne dans nos écoles afin de prétendre en assurer la sauvegarde. Nos responsables politiques se taisent et se contentent de si peu.
Le Conseil départemental de Loire atlantique n’a guerre brillé dans la protection accordée au reliquaire, mais accorde-il plus grande importance à l’identité comme au patrimoine breton sur son ressort ? Il ne songe même plus à solliciter la réunification administrative de la Bretagne.
Mme le maire de Nantes ne songe qu’aux Nantais lorsqu’il s’agit de déplorer ce vol, au risque d’oublier que la duchesse Anne était duchesse de l’ensemble des Bretons, comme mentionné sur le reliquaire.
Le reliquaire a le grand mérite de nous ramener à la situation de délabrement général de notre patrimoine culturel et des fondamentaux de notre identité bretonne, sur notre terre de toujours.
Nos responsables politiques en portent la responsabilité première, à trop se complaire au sein du système centralisateur, mais encore tous ceux qui baissent les bras par inculture, conformisme ou résignation.
Alors si au moins le reliquaire pouvait amener les Bretons à prendre conscience que leur patrimoine , dans toutes ses composantes, doit être érigé en véritable priorité politique, car il les réunit et forme leur meilleur atout dans cette mondialisation.. .
Il s’agirait-là du dernier cadeau posthume de la Duchesse Anne à ses Bretons.
Yvon OLLIVIER
auteur,juriste