Dépôt d'une plainte du Collectif breton, démocratie, droits de l'Homme auprès de la cour de justice du Conseil de l'Europe à Strasbourg
Rapide rappel de la fameuse chanson du chanteur et « humoriste » Jackie Berroyer qui motive cette plainte : « Ah, connaissez vous bien la Bretagne, avec ses femmes en coiffe et ses hommes vêtus de pagnes, leurs enfants sont hydrocéphales, les garçons aussi méchants que les filles sont sales, refrain : en Bretagne, en Bretagne, on boit du jus d'andouille et du sirop d'artichaut et nus dans la lande, ronds comme des chapeaux, on fait la nuit dans la lande des rondes à la lueur des fars aux pruneaux, et de Quimper jusqu'à Concarneau, on voit passer des femmes promenant des porcs dans des landaus pendant que leurs marins de maris se soulagent dans les flots et refusent de signer le protocole de Kyoto, et dans les fest-noz qui sont des fêtes nases, ne vous montrez pas chauds comme la braise, vous risquez de prendre dans les grelots par une Paimpolaise un vieux coup de sabot. Ah ! les Bretons sont vraiment immondes, ils mangent leurs enfants au lieu de se fournir au Tiers Monde, si on leur reproche ça les fait marrer c'est leur humour moche Noire comme leur marée ».
L'association est représentée par Me Choucq, avocat au barreau de Nantes
« Ces propos », écrit-il dans son argumentaire, « qui critiquent l'humour des Bretons au nom d'un humour prétendu en qualifiant les enfants de ceux-ci d'hydrocéphales, de méchants, de sales, de porcs, et accusent les Bretons de cannibalisme, d'alcoolisme et de violence incitent incontestablement à la haine envers le groupe de personnes ainsi désigné ». Il rappelle ensuite les différentes plaintes déposées et procédures suivies par l'association depuis mars 2006 auprès du Tribunal de Grande Instance de Paris et les réponses refusant de statuer, au motif « qu'il n'apparaît pas opportun d'engager une procédure qui n'aurait pas de chance d'aboutir qu'au prix d'un revirement de jurisprudence ».
Aussi l'avocat met-il l'accent sur les constats suivants :
« L'appréhension restrictive du droit français de la notion de groupe de personnes à raison de leur origine est discriminatoire, alors qu'en l'espèce, il existe une langue bretonne spécifique reconnue par l’État français et enseignée y compris dans les structures d'enseignement public, une région administrative dénommée Bretagne, même si elle ne recouvre pas l'intégralité de la zone géographique dans laquelle résident les personnes qui se revendiquent comme bretonnes, caractérise outre l'histoire, l'existence et la réalité de cette communauté de personnes ».
Il poursuit « sur l'atteinte au principe du droit à un procès équitable. Le dénigrement grossier et insultant d'un groupe personnes auquel sont imputés, sous couvert du droit à la création artistique et d'humour prétendu, des tares, des pratiques inhumaines et des comportements déviants constitue incontestablement une atteinte à chacun des membres de ce groupe de personnes et est de nature à provoquer le mépris et la haine envers les membres de ce groupe.
Et l'avocat d'observer : « Préservant sa conception philosophique et constitutionnelle du droit, l’État français confond systématiquement le principe d'égalité avec celui d'identité. Pourtant, sa loi et sa jurisprudence admettent, poursuivent et condamnent les discriminations commises à l'égard d'autres groupes qui n'ont pas davantage de statut juridique que les Bretons.
Ainsi, des propos similaires tenus à l'égard des juifs, de musulmans ou des citoyens originaires des anciennes colonies françaises auraient à coup sûr et sans restriction été poursuivis et condamnés au regard de la jurisprudence interne existante, et les associations représentatives de ces groupes ou communautés déclarées recevables à agir ».
D'où ce dépôt de plainte devant la juridiction européenne, la possibilité de tout recours auprès de la justice française étant épuisée.