Année après année, les classes bilingues français-breton affichent une hausse constante sur le pays de Brest. Ce succès devrait mener l'an prochain à l'ouverture d'un second site d'enseignement à parité horaire breton-français dans le paysage brestois. La conférence de Gilbert Dalgalian a permis à plus de 80 personnes d'avoir des éclaircissements sur ce thème porteur qu'est l'enseignement bilingue précoce.
Gilbert Dalgalian est l'un des spécialistes les plus renommés dans le domaine de la recherche linguistique. Né en Arménie dans une famille turcophone, il a ensuite découvert le français qui est devenu sa deuxième langue dès le plus jeune âge. Dans son livre Enfances plurilingues, il s'était attaché à étudier l'impact positif d'un environnement polyglotte sur le développement des enfants.
Cela fait cinq ans que le linguiste enchaîne les conférences au cours desquelles il s'attache à démontrer les facilités éprouvées par les élèves ayant été exposés à un environnement multilingue dès la petite enfance. Un autre de ses chevaux de bataille consiste à démontrer que la langue première ne souffre pas d'une dépréciation en termes d'acquis pour l'élève bilingue. Pour donner du poids à son argumentation, il cite des évaluations officielles ayant prouvé qu'au contraire, le niveau de français des élèves bilingues du CM2 est sensiblement plus élevé que celui de leurs camarades du monolingue.
Et l'anglais ?
Très attaché à l'enseignement des langues minoritaires, Gilbert Dalgalian se montre circonspect face à l'hégémonie de l'anglais. "Si aucune langue ne saurait faire obstacle à l'anglais, l'anglais peut faire obstacle à n'importe quelle langue". Cette idée est amenée, selon lui, à faire son chemin pour contrebalancer les partisans d'un bilinguisme français-anglais dès le plus jeune âge. Il poursuit en amenant le public à constater que les 10-11 ans s'imprègnent très vite des codes portés par la langue anglaise, jusque dans leur façon de vivre et de voir le monde qui les entoure.
Le chercheur se penche ensuite sur l'évolution historique de l'être humain, sur sa conquête de l'oralité grâce à laquelle il a su trouver sa place dans un groupe et créer une langue spécifique, une culture qui lui est propre.
Mieux dans leurs baskets
Diverses interventions ont donné lieu à un échange fructueux entre la salle et le conférencier. Scolarisée en breton depuis l'âge 3 ans, Gwendoline Jézéquel a insisté sur un atout supplémentaire dont elle a bénéficié, celui de parler breton avec ses grands-parents dès la naissance. Céline Soun, à la tête de la troupe La Obra et d'un voyage effectué par une groupe de jeunes comédiens au Guatemala, a mis en avant l'aisance des jeunes brittophones quand il s'agit de tisser des liens avec des jeunes locaux. D'autres participants venant d'un environnement monolingue francophone semblaient réticents à échanger en espagnol, dit-elle avant de rajouter catégoriquement "ils l'ont appris en classe mais dans un contexte différent, celui d'une langue étrangère et hermétiquement fermée. Les élèves du bilingue seraient donc plus à l'aise dans leurs baskets, jusqu'à l'autre bout de la planète.
Ouverture
En attendant, c'est plus prosaïquement à l'autre bout de la ville qu'est prévue la création de la deuxième filière d'enseignement public en classe bilingue, à l'école primaire maternelle de Kerargaouyat. Gageons que les parents qui s'apprêtent à scolariser leurs enfants ont été réceptifs à l'expression des uns et des autres. Le 20 janvier, ce sera le tour du conseil général du Finistère de s'associer aux associations Div Yezh et Divskouarn pour le lancement de sa campagne en faveur du bilinguisme précoce. Conférence, chanson, table ronde et rafraîchissements sont programmés dès 18h au Stella, à la maison du théâtre à Lambézellec.