S'il n'y a qu'un magazine de type « pour touristes » à acheter cet été, en Bretagne – en espérant qu'il soit vendu aussi en France – c'est bien le spécial de Bretagne Magazine de juillet.
Ce n'est pas un numéro comme les autres. En tant que spécial, il se dégage de l'habituelle couleur géo-touristico-promo de la revue (1). Il comble des manques de l'enseignement officiel de l'Histoire de France officielle, dont des générations ont eu à souffrir, surtout depuis les années 50 du siècle dernier. En Bretagne et sans doute dans toutes les régions de France, d'ailleurs aussi.
L'éminent historien breton Joël Cornette vous ouvre les portes d'une histoire sérieuse (je veux dire exacte) de la Bretagne. Il a établi le choix des repères Les 100 dates qui ont marqué la Bretagne et en a écrit le texte des commentaires (p. 6, 8 et 10). Vous trouverez ou retrouverez l'envie d'aller plus loin dans la connaissance de l'histoire de votre pays.
Quant à l’enseignement de l’histoire et à la partition de la Bretagne, Joël Cornette n’y va pas par quatre chemins, dans un entretien au Télégramme au sujet de la revue. « ...Quand on regarde la Révolution, on constate que les Bretons ont été des fers de lance et qu'au cours de la fameuse Nuit du 4 août 1789, cette Bretagne lointaine et décalée a su se faire entendre. Mais on le sait peu parce que l'histoire de la Bretagne n'est pas enseignée. Et sans doute aussi parce qu'en 1941, le détachement administratif de Nantes, capitale historique de la Bretagne avec Rennes, a quelque peu brouillé la perception que les Bretons ont de leur propre histoire ». http://www.letelegramme.com/ig/generales/regions/bretagne/joel-cornette-les-cles-de-l-histoire-bretonne-28-07-2011-1383373.php du Télégramme où Joël Cornette déclare aussi : "Peu de provinces françaises ont une histoire aussi riche que celle de la Bretagne", ce qui n’a pas permis de lancer une collection sur l'histoire des provinces françaises aux éditions du Seuil.
Quinze chapitres denses allant à l’essentiel, depuis les mégalithes jusqu’à Plogoff. Par d’éminents spécialistes comme Patrick Galliou pour l’Armorique romaine, Jean Kerhervé pour la période ducale, Serge Duigou pour les marins bretons, les trains et la modernité qu’ils ont apportée, Roger Laouenan pour la Grande Guerre, Jean-Michel Le Boulanger pour les grèves dans les conserveries de Douarnenez entre les deux guerres, Gérard Alle pour Plogoff...
Notons aussi plusieurs communications de Jérôme Cucarull, dont « Un palais royal à Rennes » avec son histoire et une minutieuse description des fastes de sa décoration intérieure. Il reste juste à regretter qu’il n’ait pas mentionné la mystérieuse disparition des statues des grands juristes bretons de la façade, que Bernard Le Nail avait dévoilée pour ABP : ( voir notre article ). Cela aurait peut-être permis de relancer l’enquête.
Un autre regret – mais dans une revue de 98 pages dont seulement 5 pages publicitaires, on ne peut pas tout mettre, l’OMEB le sait bien – est l'absence de mention de « Saint-Aubin-du-Cormier : la bataille oubliée » comme le titre ( voir notre article ).
– un Guide pour « Visiter l’histoire » : 27 lieux historiques sont sélectionnés en lien avec les chapitres ;
– une très sérieuse bibliographie sélective « Les classiques de l’histoire bretonne » est proposée ;
– la dernière page donne les biographies des auteurs.
Ce numéro spécial 1108 est paru le 13 juillet 2011, 100 pages, 7 euros.
L'OMEB ajoute – un exemple parmi d'autres –... "Pourquoi l'Éducation nationale française nous a-t-elle enseigné l'Ordre de la Toison d'Or, créé en Bourgogne et ignoré l'Ordre de l'Hermine (2) créé près de 50 ans plus tôt en Bretagne (en 1381) ? Même s'ils n'avaient pas la même envergure...
En tant que jeune élève breton à Paris, je m'en serais souvenu... Il m'a fallu attendre de découvrir la version nouvelle de cet ordre recréé en tant que symbole en 1972 par l'Institut Culturel de Bretagne pour en apprendre l'existence ancienne.
On dira les Bretons paranoïaques parfois. Non, ils constatent juste des réalités qu’ils déplorent.
(1) La revue a toujours considéré la Bretagne à 5 départements, comme il se doit, et propose de magnifiques photos. Elle met d’ailleurs ses photographes en valeur sur http://www.bretagnemagazine.com/sites-amis/sites-amis/les-photographes-de-bretagne-magazine
(2) Ordre de l'Hermine (Bretagne) pour la page wiki. Et http://icb.culture-bretagne.org/fr/ordre-hermine/index.php de l'Institut Culturel de Bretagne.