Le livre « Blanc c’est pas nul » de Marie Naudet-Sénéchal avocate, est « un mauvais coup » porté à l’expression de la Démocratie.…
Dans une interview accordée à « 20 minutes » (1) Marie Naudet-Sénéchal, co-auteure du livre "Blanc c'est pas nul" avocate de son état, qui aurait dû apporter une crédibilité aux éléments justifiant de la démarche, fait une démonstration de sa méconnaissance de toute l'histoire du vote blanc qu'elle avoue n'avoir découverte, il est vrai, qu'il y a très peu de temps. Le livre ayant été réalisé, selon elle, dans l'urgence, pour coller à une opportunité.
S'il est très intéressant de voir le débat concernant la reconnaissance du vote blanc trouver une plus grande audience du fait de la co-signature d'un journaliste people auprès de médias qui le sont devenus, il ne faut pas être dupes et ne pas accepter de voir la réalité des faits tronquée.
Le « témoignage » de l'avocate qui devrait normalement donner une couleur juridique à l'ouvrage, entraîne de facto la responsabilité, sauf à ce qu'il s'en désolidarise, de son co-auteur Bruno Gaccio.
La première réponse de Marie Naudet-Sénéchal éclaire parfaitement son ignorance sur le sujet.
Elle indique « Le vote blanc tel que nous le soutenons ne compterait pas dans les suffrages exprimés et ne remet pas en cause la désignation des candidats. Il serait en revanche un indicateur, un révélateur plus précis et plus objectif de l'état du corps électoral ».
Or en dehors du fait que ce n'est pas la position de l'association Blanc c'est exprimé, en regardant le site de celle-ci ou lisant le livre « Vote blanc la longue démarche » (2), elle aurait su que la démonstration qu'elle évoque a déjà été faite dès… 1989, avant la création de l'association, de la valeur « d'indicateur de l'état du corps électoral ». Cela lors de l'élection cantonale de Saint-Brieuc, à laquelle s'était présenté son futur créateur.
Absent au deuxième tour, le candidat avait appelé à voter pour l'un ou l'autre des deux restants en lice, un P.S. et un R.P.R. et à ne s'abstenir en aucun cas mais, en dernier recours, à voter blanc, mais à voter.
Il y eut 10,44 % de plus de votants et + 374 % de plus de bulletins blancs et nuls qu'au premier tour !
A l'époque, le regretté Centre d'Information Civique défendait l'idée de la reconnaissance du vote blanc depuis de longues années.
Malheureusement, dépendant des subsides publics, il n'avait pas les « coudées franches.» Il avait aussitôt déclaré « que la démonstration éclatante était faite à Saint-Brieuc du bienfondé de ce qu'il défendait. »
A savoir la légitimité de la reconnaissance du vote blanc comme étant un suffrage exprimé. Cela avait entraîné, sur les conseils du C.I.C. la création, en Bretagne, de l'association.
Je peux donc dire que Marie Naudet-Sénéchal, avocate non spécialisée en droit constitutionnel a « oublié volontairement ou non » le travail réalisé depuis plus de 20 ans. En plus de réinventer « l'eau chaude ! » elle porte de ce fait, d'un rapide effet de manche, par ses propos, « un mauvais coup » à l'expression de la Démocratie qu'est le vote.
Ses déclarations, du fait de ses carences vont dans le même sens et donnent, de plus, du crédit aux questionnements ubuesques du Groupe d'études créé par le bureau de l'assemblée nationale abstentions et vote blanc qui a pour objectif « de savoir pourquoi les Français ne votent plus ? » Ce que les Français et… eux-mêmes savent très bien.
En politique, basée sur le marketing et la communication, on sait « allumer un feu de broussailles pour faire oublier que la maison brûle ! »
Plus loin elle déclare : « Ensuite, un deuxième effet positif du vote blanc et s'il y avait un taux important, pourrait signifier qu'il y a de la place pour des hommes nouveaux, pour du changement, c'est ce qui s'est un peu passé au plan municipal avec l'élection de Borloo à Valencienne…en son temps ».
Elle oublie, là encore, « l'absence de proportionnelle et l'existence de la loi de 1995 de financement public des partis politiques ». Cette dernière est en fait une véritable OPA – identique à celle qu'ils dénoncent concernant la financiarisation de l'économie - réalisée par les deux partis majoritaires qui abusent trop souvent de leur «position dominante ».
Cette loi, dont les partis refusent la réforme, empêche tout renouvellement et permet au contraire la professionnalisation de la classe politique.
Aucun élu, aujourd'hui, ne peut dire qu'il est « un élu libre ». Qui paie contrôle !
Un exemple est vécu à la veille de la présidentielle. L'absence de moyens financiers pour mener une campagne est peut-être aujourd'hui, en effet, une des raisons qui ont amené Borloo à « jeter l'éponge ». Ce qui sera peut-être demain le cas pour Villepin et d'autres candidats.
Mais Marie Naudet-Sénéchal va plus loin dans ses errements et fait injure à l'histoire et aux faits lorsqu'elle dit : « Le vote blanc n'est ni un vote protestataire ni un vote contestataire, c'est un vote complémentaire ».
Pour avoir reçu plusieurs milliers de lettres lors du lancement de l'association et pour être à l'écoute permanente de mes concitoyens depuis 1989, je m'inscris en faux à cette position.
J'ai recueilli, oralement ou par écrit, les témoignages de nombreux citoyens qui ne votaient plus depuis des années ou votaient F.N. en signe de protestation, de contestation, et qui sont revenus vers les urnes pour voter blanc. Certains ont indiqué avoir, au dernier moment, dans l'isoloir, voté pour un candidat.
Ce dont je me suis toujours félicité. L'association étant « non partisane ».
Marie Naudet-Sénéchal, avant d'énoncer cette contre-vérité, aurait dû connaître les raisons qui amènent les électeurs, en dehors de remplir leur devoir de citoyen, à ne pas favoriser l'émergence de courants extrémistes, dangereux à terme pour le pays, qui aiment la politique mais refusent les comportements politiciens, à voter Blanc.
Les raisons invoquées appartiennent, la plupart du temps, au contraire, en grande partie, au catalogue de celui « des votes de protestation, de contestation ! »
En votant blanc, les électeurs qui n’ont plus confiance dans la classe politique contestent :
- le mépris affiché à leur endroit par les élus en dehors des périodes électorales ;
- le fossé qui se creuse chaque jour un peu plus entre les discours politique et la nature de leurs problèmes et préoccupations au quotidien ;
- la professionnalisation de la vie politique, le carriérisme et le corporatisme de ses représentants ;
- de voir les partis rester sourds à leurs aspirations légitimes ;
- le climat délétère, maffieux des arcanes du pouvoir, l’existence de trop nombreuses affaires ;
- l’enrichissement « sans cause » des partis politiques grâce à la loi de 1995 de financement public et les « abus de position dominante » sur leurs propres élus ;
- le centralisme parisien et jacobin, le manque de reconnaissance des Régions, de respect de leurs Territoires (en Bretagne problème de sa réunification), de leur identité, de leurs langues régionales et/ou minoritaires ;
- le cumul des mandats et l’absentéisme qui en découle ;
- la politique politicienne ;
- la duperie « des désaccords de façade » ;
- les élus qui votent des lois et ne les respectent pas ;
- le véritable « système oligarchique » existant en France ;
- les privilèges scandaleux des élus ;
- en cette période de crise, l’utilisation anarchique et scandaleuse des fonds publics et d’avoir à « faire seuls » les efforts nécessaires sans que leurs « représentants » prennent leur part ;
- le fait d’assister chaque jour, impuissants, aux attaques portées, sans aucun discernement, par volonté de les offrir « au Marché » contre tous les services publics dans les secteurs de l’Éducation nationale, de la santé publique, de la sécurité ;
- le délabrement de leur système de protection sociale ;
- les grandes manœuvres et autres gesticulations de « postulants à la candidature » de tous les partis qui ont déjà démontré, en leur temps, leur incapacité à tenir leurs promesses ;
- le « blanc seing » donné à des élus qui agissent comme des « commerçants qui n’assureraient pas le service après-vente » ;
- les relaxes, les classements sans suite, pour cause de vices de forme "providentiels", de « longueur des procédures » de la "responsabilité sans culpabilité", et des "condamnations dispensées de peine" ;
- la politique de répression au lieu de la prévention ;
- les arrangements financiers, comme dans l’affaire des emplois fictifs, entre « petits amis » de droite et de gauche, qui s’entendent « comme larrons en foire » pour gruger les contribuables en leur infligeant une triple peine et faire entrave à la Justice qu’ils devraient faire respecter... ;
- les « amnisties » dont bénéficient - grâce à leurs collègues - les élus qui sont condamnés dans des affaires de corruption, de blanchiment d’argent ;
- de voir s’accélérer les atteintes portées par son instrumentalisation à la vie associative reposant sur le bénévolat, que l’on veut faire entrer dans le secteur marchand ou institutionnel, ce qui porte atteinte à la Démocratie ;
- de voir des procureurs de la République dépendre, pour l’avenir de leur carrière, directement du seul Pouvoir politique en place ;
- la collusion entre les politiques et les médias « aux ordres » et de voir toujours les mêmes tenir les mêmes arguments, faire les mêmes promesses devant les mêmes journalistes (?) qui sont oublieux de leurs responsabilités.
Aussi, loin d’être un « vote complémentaire » comme le dit Marie Naudet-Sénéchal, car il n'est pas une abstention masquée, le vote blanc est une volonté affirmée, un choix véritable, responsable, un acte civique réfléchi, un vote responsable ! Le vote blanc est « Un vote à part entière »
Il appartient en effet au citoyen qui veut voter blanc de réaliser lui-même son propre bulletin.
Que les partis politiques se montrent unanimes, en cette période pré-électorale à reconnaitre le vote blanc « a minima » ne trompe personne.
Je ne peux quant à moi oublier que depuis 1989, les partis ont toujours, malgré leurs grandiloquentes déclarations en sa faveur, refusé de reconnaître cette expression aux électeurs.
Les promesses électorales ne valent, on le sait, que pour ceux qui les écoutent... et y croient.
Le débat public, le premier depuis 1852, sur la reconnaissance du vote blanc, organisé à l’assemblée nationale le 31 janvier 2003, de triste mémoire républicaine, auquel j’ai assisté, est là pour convaincre que la vigilance doit être de mise.
Le livre « Blanc c’est pas nul, » qui a le mérite d’exister, tel qu’il est défendu par l’avocate Marie Naudet-Sénéchal, ajoute certes par sa médiatisation, à l’audience du vote blanc mais plus encore, à la confusion ambiante.
Cela justifie de ma part, pour éclairer le débat, les remarques faites plus avant.
Les Français à qui « la démocratie a été confisquée » savent que le vote blanc reconnu comme un suffrage exprimé peut leur permettre de voir celle-ci leur être restituée !
Les citoyens ne veulent plus être victimes de la longueur de la procédure pour y accéder !
(1) (voir le site) de 20 Minutes.
(2) « Vote blanc la longue démarche », éditions L’Écharpe, 2007.